« Super-War » décortique la rivalité Marvel-DC Comics
C’est bien connu, chez les fans de comics, deux camps irréconciliables s’affrontent depuis la nuit des temps (en vrai, depuis les années 1960) : DC, la maison de Batman et Superman, et Marvel, écurie de Spider-Man, des Avengers et des X-Men. Cette rivalité entre compagnies mais aussi entre fans est au coeur de Super-War, un essai écrit en anglais par le journaliste américain Reed Tucker, commandé par l’éditeur français Fantask, qui continue son excellent boulot sur les essais consacrés à la pop culture.
Adoptant une approche chronologique, l’auteur décortique la guerre que se mènent sans relâche les deux marques surtout à partir de la réinvention de Marvel sous la houlette de Stan Lee, de Jack Kirby et de quelques autres. Les faits sont connus, ils ont été largement rapportés notamment dans un ouvrage de référence de 2012 publié en France par Panini, Marvel Comics : L’Histoire secrète de Sean Howe. C’est un peu le problème de Super-War : pendant deux bons tiers des pages qui le composent, il n’apporte rien de radicalement neuf à cette histoire des comic books. Mais on peut se délecter une fois de plus du récit homérique des empoignades par parutions interposées, coups éditoriaux et commerciaux ou déclarations dans la presse entre ces deux mastodontes de la culture de masse. Comme le rappelle Tucker, si elles se sont longtemps différenciées par des valeurs et une culture d’entreprise aux antipodes – pour la faire courte, DC est la coincée conservatrice et Marvel, la décontractée progressiste –, les deux firmes ont à l’arrivée beaucoup plus en commun qu’elles veulent bien l’admettre, à cause notamment d’une porosité historique entre ses départements artistiques, avec un nombre incalculable de transferts de talents, aujourd’hui encore, d’une maison à l’autre.
Dans son dernier tiers, Super-War tire enfin son épingle du jeu en ayant le mérite de la fraîcheur. Tucker s’y penche plus longuement que ne le faisait Howe sur ces vingt dernières années et sur le changement de paradigme qui s’est opéré dans l’industrie, chez Marvel comme chez DC. Ces deux sociétés devenues succursales de méga-corporations multimédias ne sont plus seulement des éditeurs de BD, mais aussi de plus en plus des catalogues de franchises potentielles tournées vers le cinéma et la télévision. C’est intéressant, documenté, riche en témoignages et aussi un peu déprimant. L’auteur a raison de pointer les logiques économiques et industrielles qui décident de presque tout désormais dans ce qui est plus que jamais un business. Mais on insistera sur le « presque » pour rappeler que Marvel comme DC continuent malgré tout de produire de bonnes BD grâce à des scénaristes, dessinateurs, coloristes, etc… doués et passionnés.
Reed Tucker passe sans doute un peu vite sur ce point et son ouvrage manque de la parole de ces soldats actuellement en exercice. La lecture de Super-War demeure néanmoins largement recommandée aux fans de Marvel comme aux fans de DC. Et même, soyons fous, à ceux qui refusent de choisir entre les deux.
Super-War. Par Tucker Reed. Fantask, 520 p., 25 €.
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Effectivement, les faits sont connus, donc je ne vois pas l’intérêt de ce bouquin. D’autre part, il est très possible d’être un fan de DC et de Marvel à la fois, cette opposition a toujours été ridicule. Il aurait été plus intelligent de raconter les connexions de DC avec la mafia pendant et après la guerre. Ou les guerres intestines à Marvel depuis les années 80.
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