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Supergirl : Woman of Tomorrow

30 août 2022 |
DESSINATEUR(S)
SCENARISTE(S)
EDITEUR(S)
COLLECTION
PRIX
21 €
DATE DE SORTIE
08/07/2022
EAN
B09SXPKM1M
Achat :

De Supergirl, on n’a jamais attendu grand-chose. Même dans ses aventures les plus réussies, elle est toujours apparue vouée à n’être qu’une sous-Superman, ce cousin si parfait : espérer s’extirper de son ombre écrasante était un pari perdu d’avance. À l’impossible nul n’est tenu et c’est pourtant ce que parvient à faire avec une facilité déconcertante le prodige Tom King (Sheriff of Babylon), bien aidé par le dessin inspiré de la Brésilienne Bilquis Evely et par la palette parfaite choisie par son compatriote Matheus Lopes à la couleur. Visage émacié qui rappelle les héroïnes de Kevin O’Neil (La Ligue des Gentlemen Extraordinaires), chevelure en cascade, grand yeux tristes, silhouette plus fuyante que vraiment sculpturale, cette Kara Zor-El échappe totalement au cliché de la pom pom girl qui colle à la licence depuis toujours. Une relecture passionnante à tous points de vue, très libre et en même temps très respectueuse du mythe supermanien posé par Joe Shuster et Jerry Siegel.

supergirl_imageComme avec son cousin Clark, l’une des tentations classiques des auteurs régulièrement chargés par DC de revisiter Supergirl est de chercher à accentuer son humanité pour contrebalancer sa stature divine. On reconnaît que ça peut effrayer. Mais pas Tom King qui en a vu d’autres et notamment les New Gods de Kirby, dans son extraordinaire Mister Miracle. La Terrienne d’adoption et ses multiples alter ego n’intéressent pas vraiment le scénariste qui prend justement le parti-pris inverse et se saisit à bras le corps du statut bigger than life du personnage pour creuser sa légende et conter cette aventure intégralement située à des années lumière de notre planète avec l’emphase d’une épopée antique. Celle qui est chargée de narrer cette odyssée homérique, c’est Ruthye, une gamine dont le père a été lâchement assassiné par un brigand, Krem des Collines d’Ocres. Ruthye jure de se venger en poursuivant l’auteur du crime jusqu’au fin fond de la galaxie s’il le faut. Elle croise la route de Supergirl, venue se biturer dans ce coin paumé loin de tout soleil et où ses pouvoirs de régénération sont donc amoindris. La petite paysanne convainc la superhéroïne de se mettre, à contrecoeur, à son service. L’histoire est peu ou prou celle de True Grit, trame basique sur laquelle ce western spatial convaincant se double d’un beau conte moral.

Le méchant, Krem, est un adversaire coriace, un roublard, qui n’hésite pas à exploiter les faiblesses connues des Kryptoniens (la fameuse Zone Fantôme où un soleil vert prive Supergirl de ses pouvoirs). L’affaire qui sur le papier aurait dû se régler en quelques pages, se complique sans cesse, devient bientôt personnelle pour Supergirl et finira par s’étaler sur des mois et des mois, de planète en planète, d’affrontements empêchés en rendez-vous manqués, comme dans le film Les Duellistes de Ridley Scott. L’occasion d’admirer les sublimes décors proposés par Evely dans des planches parfois renversantes. Certaines séquences, dont une course à dos de super-cheval contre une torpille magique, sont extraordinaires et les exploits herculéens de Kara, largement à la mesure de ceux de Kal-El. Les deux cousins partagent bien le même ADN mais pas tout à fait la même personnalité. Sous la plume de Tom King et telle que dépeinte par Ruthye, dans une langue très ampoulée (un régal d’écriture), Supergirl devient une figure plus nuancée que son parfait cousin, animée de la même noblesse intrinsèque mais parcourue de tourments intérieurs qui font résonner encore plus fort ses hauts faits. Voilà le run essentiel qu’on n’imaginait pas lire un jour sur le personnage.

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