Talc de verre
Rosângela a tout ce qu’il faut pour être heureuse. Un cabinet de dentiste florissant, un bel appartement dans un quartier chic, deux enfants épatants et un mari aimant, cardiologue réputé. Mais qu’est-ce qui la tracasse autant? Quelle est cette petite voix au fond de sa tête qui la fait douter de tout, remettre en question ses acquis et ses réussites? Et pourquoi se déclenche-t-elle quand elle voit sa cousine, jeune femme pas gâtée par la vie mais qui ne quitte jamais son sourire étincelant ?
Après le tendu Tungstène, une des belles surprises de l’an dernier, on attendait beaucoup du nouvel opus du Brésilien Marcello Quintanilha. Et, s’il on est déstabilisé, on n’est pas déçu. Déstabilisé par cette voix off omniprésente, qui décrit le tourbillon de sentiments qui vrille la tête de Rosângela, jusqu’à la faire chavirer dans une dépression doublée d’un délire paranoïaque autodestructeur. Car ce qui ressemble d’abord à une classique crise de la quarantaine – besoin de vivre une seconde jeunesse, sexe, drogue et rock’n’roll – vire rapidement à la pathologie psychiatrique. Quintanilha réussit son coup en ne lâchant pas d’une semelle son héroïne, éreintant le lecteur happé de force dans cette spirale psychotique, dessiné d’un trait fin, mouvant mais réaliste, au noir et blanc glaçant. Si l’on parvient à ne pas décrocher dans ce portrait troublant (la possibilité de faire un rejet face à ce personnage en perdition et cette narration audacieuse existe bel et bien), on voit alors se déployer une bande dessinée originale à la mise en scène virtuose, qui a su faire d’un sujet en apparence banale, un suspense psychologique vertigineux.
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