Un chevalier fantôme coincé dans son armure, un oiseau séducteur aussi chatoyant que prétentieux, une sorcière qui a survécu au bûcher, un chat tout plat, un trio de brigands désespérés… Voilà une bande d’anti-héros en quête de rédemption, des spectres et créatures qui luttent pour rester accrochés dans le monde des vivants. Et qui vont tenter d’arracher leur survie en se rendant à Jérusalem, où on leur promet un sortilège censé les libérer. Mais dans ce Moyen Âge obscur et dangereux, la tâche s’annonce ardue.

Voilà un étrange album, quelque part entre Le Magicien d’Oz et Les Sept mercenaires, une véritable aventure tous publics au temps des Croisades. À la manière d’un conte, l’histoire de Stephen Desberg se déploie sous la forme d’une quête qui paraît impossible, et s’enrichit de flash-back et de récits dans le récit, pour présenter l’itinéraire de chacun des mystérieux protagonistes. Pas étonnant, dès lors, de retrouver l’épatant Alexander Utkin aux pinceaux, lui qui a sublimé le folklore russe dans Le Roi des oiseaux et La Princesse Guerrière. Son trait marqué jeunesse, ses ombres charbonneuses et ses couleurs chatoyantes donnent une patine unique à cette aventure souvent saugrenue, la rendant accessible à un large lectorat. Riche en action, ce premier tome avance tambour battant mais réserve encore bien des secrets : on espère que le second volume ne précipitera pas trop la conclusion, car on a bien envie de passer un peu de temps en compagnie de ces Ex People, damnés de la Terre dont on ne sait pas encore s’ils ont un grand coeur ou de noirs desseins…