Tocqueville, vers un nouveau monde
À l’été 1831, Alexis de Tocqueville et Gustave de Beaumont, deux Français de la haute société, rejoignent les États-Unis avec l’intention de rencontrer quelques « sauvages », ces « fameux indiens » aux « corps forgés par la forêt, la chasse et la guerre ». Ils vont affronter un immense territoire pour tenter d’approcher le mythe. D’abord naïfs et enthousiastes, les deux explorateurs vont vite déchanter face à la réalité, entre nature corrompue par la société et désastre humain d’Indiens rongés par l’alcoolisme et la pauvreté, quand ils ne sont tout simplement pas assassinés…
Première BD pour Kévin Bazot qui s’empare d’un sujet rebattu, la conquête de l’Ouest, vue à travers le regard de deux étrangers, projection vers un ailleurs que les pionniers de l’époque imaginent forcément meilleur. D’une candeur béate face à cet immense espace à conquérir, les deux personnages s’imaginent un monde exotique, sauvage, pur, un paradis sur Terre répondant à « la destinée manifeste » supposée, celle de répandre la civilisation par la colonisation. Mais rapidement, la dure réalité leur révèle le crime, l’asservissement, l’urbanisation galopante et une nature corrompue par la culture. L’album aurait pu être intéressant mais souffre de trop d’écueils. Graphiquement, l’auteur est assez à l’aise dans les scènes d’intérieur et les horizons luxuriants de forêts traversées par les fleuves. Si bien qu’il les multiplie et finit par tourner en rond. Technique, couleurs et trait sont malgré tout au point mais n’emballent pas particulièrement. La faute aussi à un scénario sans relief, manichéen (le méchant homme face à une nature violée), d’un classicisme ennuyeux – juste les impressions de deux voyageurs, pas aidé par les longs récitatifs monotones qui ressassent le même message. Bref, l’aventure est molle et on termine l’album avec la fâcheuse impression d’avoir lu cette BD mille fois. Appliqué mais scolaire, il y manque du souffle et un regard original.
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