« Topor, dessinateur de presse », une somme indispensable des Cahiers dessinés
Décédé en 1997, l’artiste multiforme Roland Topor n’a rien perdu de sa force et de son actualité. La preuve à nouveau avec le superbe Topor, dessinateur de presse publié par Les Cahiers Dessinés.
Alors que les éditions Wombat ont réuni, dans un chouette petit volume, ses strips et bandes dessinées, et que la galerie parisienne Anne Barrault exposera certaines de ses oeuvres du 18 octobre au 30 novembre, Les Cahiers dessinés vont faire la joie des amateurs de beaux livres avec ce Topor, dessinateur de presse. Un pavé de plus de 360 pages présentant le travail d’une grande richesse et d’une superbe variété que le co-créateur du mouvement Panique a accompli dans divers journaux, en France, en Italie ou aux États-Unis.
Peintre, poète, scénariste, homme d’images et de mots, Topor a beaucoup collaboré avec la presse, sans jamais se fondre dans le moule du genre. « Topor n’était pas un dessinateur d’actualité, raconte Willem, dans un entretien à l’intérieur de l’ouvrage. Il a essayé. Mais à part de Gaulle, il n’a jamais fait de caricatures d’hommes politiques. Un dessinateur de presse vit dans l’adrénaline de l’actualité. Topor, lui, semblait ne pas en avoir besoin. Son adrénaline, il la sécrétait tout seul.« Ce que confirme l’artiste Gérald Poussin, passé par Hara-Kiri, pour qui le travail de Topor a toutefois été décisif pour le dessin de presse : « Il l’a complètement libéré en introduisant une altitude, une folie, un non-sens jusqu’alors inconnus. Les professionnels des médias ont vite compris qu’il y avait là une substance très différente. Ce Topor qui n’aimait pas l’actualité leur a fait comprendre ce qu’était un journal, ce qu’était la télévision. »
Après un texte biographique évoquant son parcours dans la presse, le livre, ponctué d’entretiens, déroule des dizaines de dessins, en noir et blanc ou en couleurs, parus dans des journaux aussi variés que Le Nouvel Observateur, le New York Times (où Topor fut un pilier de la rubrique Op-Ed), Hara-Kiri, Elle, Record, Minute (avant qu’il ne soit d’extrême droite), Il Giornalone, Libération, Sciences et Avenir… Des images aux fines hachures, nerveuses et inquiètes, des mises en scène oniriques, des griffonnages percutants, des rébus inventifs, autant de styles pour une patte unique, reconnaissable entre toutes. Et surtout, des dessins qui ont gardé aujourd’hui toute leur puissance subversive et leur graphisme troublant, qui n’ont que peu d’égaux aujourd’hui dans la presse. Voilà aussi pourquoi, au-delà de sa superbe facture, cet ouvrage est incontournable pour tous ceux qui s’intéressent au genre et à cet artiste hors norme.
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Topor, dessinateur de presse.
Texte d’Alexandre Devaux.
Les Cahiers dessinés, 35 €, octobre 2014.
Photo ©: DR-Archives-Nicolas-TOPOR
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