Trophy Hunters
Un fantôme erre dans la campagne proche d’un petit village de Finlande. Sans doute celui d’un homme retrouvé mort récemment, des années après avoir disparu. Son frère, écrivain, rentre pour l’enterrement. Et doit faire face à l’amertume et aux rancoeurs de sa famille, persistantes suite au livre autobiographique et sans concession qui l’a rendu célèbre. Dans la seconde histoire de cet album, on retrouve des années plus tard la nièce de l’écrivain devenue grande, qui cherche sa voie. Les études ont échoué, son flirt avec un aspirant et pédant artiste débouche sur une impasse. Quel sens veut-elle, va-t-elle donner à sa vie ?
Avec son trait tremblant voire flou, ses personnages à l’anatomie sommaire, ses décors juste esquissés, ses cases parfois d’apparence sale, le Finlandais Jaakko Pallasvuo donne l’impression d’un travail fragile voire amateur. Il n’en est rien, et il faut se plonger dans son récit pour bien le percevoir. Car des traits singulièrement expressifs se dessinent parfois sur les visages, et le rythme faussement lent et déstructuré contribuent au malaise global irradiant cette double histoire. Dès lors, les apparentes maladresses du dessin renforcent l’errance mentale des personnages, à la recherche d’une pièce manquante dans leur histoire familiale ou d’une clef pour ouvrir les portes de l’avenir. La bande dessinée ne se défait pas de son aspect rêche mais se fait alors sensible et sensitive, comme une confession douloureuse ou un rêve étrange et persistant. Un travail atypique et aride, mais pas hermétique pour qui prendra le temps d’écouter cet écrivain meurtri et sa nièce angoissée. Et ce spectre qui, par seulement quelques traits, semble hurler de douleur. Tous ont des choses à dire et Jaakko Pallasvuo a sans doute trouvé la voie la plus intéressante pour l’exprimer.
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