Un Norvégien vers Compostelle
On ne l’attendait pas là, Jason. Auteur de récits mélancoliques taiseux, de récits de genre empreints de nostalgie, dans un style cartoon minimaliste, l’auteur norvégien installé en France revient avec une bande dessinée autobiographique. Dans laquelle il raconte son pèlerinage vers Saint-Jacques de Compostelle. La route, les autres marcheurs, ce qu’il attend de ce voyage si particulier pour lui qui n’est pas chrétien. Mais aussi les ampoules, les punaises de lit, les soirées solitaires à avaler son sandwich sur un coin de table avant de dormir quelques heures, bercé par les ronflements de ses congénères de dortoir…
Plus bavard qu’à l’ordinaire, Jason choisit tout de même de mettre en oeuvre son savoir-faire en matière de mise en scène ultra-sobre et d’humour décalé, au service d’un livre qui s’avère pus proche du récit introspectif que du carnet du voyage. En effet, et c’est assez bien vu, on ne compte pas le nombre de fois où l’auteur commente ce qu’il voit plutôt qu’il ne le dessine. Le dessin, d’ailleurs, est conforme à l’habitude: des personnages animaliers aux expressions limitées mais limpides, un usage parcimonieux des décors toujours dans l’objectif de la compréhension de l’action, avec seulement quelques trames pour enrichir son noir et blanc.
Plus surprenant, par rapport à ses autres albums (Les Poches pleines de pluie, J’ai tué Adolf Hitler, L’Île aux 100000 morts…) il n’hésite pas à enchaîner les voix off, comme dans un journal intime. Prouesse pour un homme qui s’avoue peu doué pour les relations sociales. La magie du chemin vers Saint-Jacques ? Peut-être. Quoi qu’il en soit, alors qu’il blaguait sur la route en racontant que, devenu quinquagénaire, c’était soit le pèlerinage soit l’achat d’une Porsche, il se pourrait bien que cet anniversaire soit aussi pour les lecteurs la découverte d’une nouvelle facette de son talent de conteur.
Publiez un commentaire