Le 19 octobre 1995 à Djibouti, le corps calciné du magistrat français Bernard Borrel est retrouvé dans un ravin. On annonce alors à Elisabeth Borrel que son mari s’est suicidé. Elle-même magistrate, elle se rend cependant vite compte que l’explication ne tient pas. Traces de lutte relevées lors de l’autopsie, absence de suie dans les voies respiratoires, tout semble pointer vers un assassinat pour se débarrasser d’un personnage gênant en charge de dossiers sensibles. Épaulée par ses avocats et des journalistes engagés, la veuve du juge amorce alors un bras de fer avec les autorités françaises et djiboutiennes pour que la lumière soit faite sur ce qui a tout l’air d’être une affaire d’État.

D’abord publiée dans La Revue dessinée (qui fêtait en 2017 ses 4 ans), cette mise en images de la célèbre affaire Borrel s’offre pour sa publication chez Soleil une colorisation ainsi qu’un dossier complémentaire au récit sous la forme d’un entretien avec Elisabeth Borrel et son avocat. Au scénario, on retrouve le journaliste David Servenay, lui-même impliqué dans l’histoire puisqu’elle lui aura coûté son poste chez RFI en 2007.

L’auteur a fait le choix opportun de collaborer avec le dessinateur Thierry Martin (Myrmidon, Nam-bok), qui va plus loin que la simple illustration des faits puisque le découpage inventif des cases et les trouvailles graphiques intelligentes (schémas, vignettes…) qu’il propose deviennent un appui réellement utile à la compréhension du récit. Ainsi, malgré toutes les complexités de cette affaire, tant liées au nombre de personnes impliquées qu’au fonctionnement même de la justice, la lecture reste fluide et agréable tout au long de l’enquête, découpée ici en 9 temps.

Une excellente bande dessinée de reportage qui remplit donc bien son rôle : celui d’informer, de questionner, d’éveiller et, et c’est peut-être le principal, de révolter.