Une éducation orientale
Né à Bagdad, en 1959, d’un père arménien et d’une mère grecque, Charles Berberian grandit au Liban, au plus près de son frère Alain et de sa grand-mère, avant de s’envoler pour la France, y étudier, s’y implanter. Et ne pas retourner à Beyrouth pendant des années. Il revient ici sur cette « éducation orientale », sur des anecdotes familiales chères à son coeur, sur la géographie d’une ville à la fois mouvante et permanente, sur une culture riche et des habitants ayant appris à vivre avec la guerre et les crises. Par petites touches, c’est le portrait d’une famille qui se dessine.
Voilà peut-être l’un des plus beaux livres de Charles Berberian (Monsieur Jean, Afterz, Jukebox, Les Amants de Shamat, Charlotte Perriand…), ou en tout cas l’un des plus touchants. Probablement car c’est l’un des plus intimes et personnels. Il se peint enfant, fan de Blueberry, admiratif de son grand frère, le jeune homme le plus classe de Beyrouth, qui deviendra cinéaste (La Cité de la Peur…) et est décédé en 2017. Il se remémore les mots tendres de sa grand-mère, les soirées cloîtrées dans le couloir en attendant que les bombardements cessent, le grand hôtel sur la plage, les discussions politiques… Il récolte aussi le témoignage de victimes de l’explosion du port en 2020, évoque des manifestations ou croque une ville en perpétuelle ébullition. Avec l’élégance qui caractérise son trait, Charles Berberian use d’encres colorées, de stylo, de collages et superpositions, afin de former un recueil non linéaire mais très sensible, comme le journal d’une quête intime, celle de la ville de son enfance et de morceaux de bonheur perdu. Un livre qui restera.
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