C’est arrivé silencieusement, mais les signes ne trompent pas. Calvitie, poils blancs et fessier mou, tout le corps de Pochep le lui crie : il est vieux, dépassé, has-been. Ne se résignant pourtant pas à dire adieu aux belles créatures des clubs gays branchés, le nouveau quinqua commence une course contre le temps et la gravité pour retrouver le physique de sa jeunesse.

Pochep (Dress Code, New York 1979, Projet 17 mai) narre ici avec un humour corrosif une crise de la cinquantaine aux allures de drame existentiel. L’auteur ne ménage pas son alter-ego dessiné, détaillant les étapes de sa décrépitude mentale et physique, et tournant en ridicule complet ses vains efforts de reprise en main. Son auto-dérision sans pitié et le tableau qu’il peint du milieu gay parisien (vu de l’intérieur, pour une fois) ne manqueront pas de faire décrocher quelques sourires même aux lecteurs les moins concernés.

Côté graphique, les déboires et ruminations intérieures du héros sont mises en scène de manière mordante et efficace, avec un trait peu flatteur dont le comique repose surtout sur le contraste grotesque entre son propre corps de « vieille peau » et les silhouettes sculptées qui le narguent. Et malgré une certaine répétition dans les ressorts comiques, le fourmillement de détails et la colorisation numérique très pop et flashy ne laissent pas de place à la monotonie.

En somme, un bon moment qui ne sera pas sans déclencher quelques rires jaunes dans la tranche d’âge dont il est sujet… et un irrésistible besoin de compter ses cheveux blancs chez les autres.