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« Vita Obscura », un who’s who original et foisonnant

16 juillet 2015 |

vita_obscura_couvQui connaît Joshua Norton, premier empereur autoproclamé des États-Unis mort comme un vagabond en pleine rue en 1880 ? Et Joseph Pujol le pétomane, chanteur à succès au Moulin Rouge ? Sans oublier D.B. Cooper, obscur passager auteur d’un détournement d’avion en 1971 et jamais retrouvé depuis, ou encore Robert McCulloch, riche homme d’affaires qui a réussi dans la vente de tronçonneuses avant de s’offrir le London Bridge pour sa petite ville d’Arizona ?

Dans la veine des suppléments de périodiques américains des années 1920, l’auteur allemand Simon Schwartz (De l’autre côté) invite à une balade truffée de curiosités. Pour support, 33 figures du passé restées dans l’ombre des grands de l’Histoire. Et pour cause : oubliés car trop excentriques ou en marge des us, un destin farceur a eu raison de leur postérité. Tel le docteur Thomas Harvey qui préleva en cachette le cerveau d’Albert Einstein avant de le couper en dés, histoire de percer le secret d’un génie ou Ken Kesey l’affreux qui a cru voir dans le LSD la panacée universelle ! Pas grave, Simon Schwartz vient leur rendre un hommage malin. Vita Obscura brasse ainsi tous les domaines, de la science à la politique en passant par les arts à raison d’une planche en format à l’italienne par personnage.

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Tour à tour passionnant, intrigant ou curieux, l’album multiplie anecdotes et récits farfelus, devient sérieux quand il capte l’origine d’un mot ou d’une expression et surtout s’adapte, dans la narration et le graphisme, à une époque, un thème et une personnalité. Car Schwartz ne se contente pas de plaquer une biographie sans sel piquée dans wikipédia sur quelques cases vaguement dessinées. Il va loin, beaucoup plus loin en exploitant les possibilités du 9e art et c’est là tout l’intérêt de l’album.

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Il déconstruit ainsi la page pour lui donner du rythme (les cases de « Trip » sont éclatées en étoile, juxtaposition d’étiquettes dans « Le roi Wladyslaw III »), conforme les styles graphiques et les techniques à l’époque (estampes, collages, montages photos, cartoon, fusain, aquarelle, aérographe…) et nimbe d’une intention comique – réussie – tous ces destins en marge, sans jamais ennuyer. Et pourtant le risque était grand. Un seul petit reproche : l’absence de sources. Un conseil aussi : mieux vaut éviter la lecture linéaire. Pour le reste, Vita Obscura est un « Who’s Who » subtil et instructif qui, en plus de dérouter et d’enchanter, révèle un talent rare. Joli coup d’auteur et d’éditeur !

Vita Obscura.
Par Simon Schwartz. Ici même éditions, 19,50 €, juin 2015.

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