Ziyi **
Par Jürg et Jean-Luc Cornette. Scutella éditions, 20 €, janvier 2013.
Une petite bestiole tout mignonne, entre l’ourson pour la fourrure et le singe pour l’expressivité, se libère du joug d’humains tortionnaires. Et découvre un monde de violence et d’atrocités, des villes ravagées (par une guerre?), des cadavres par dizaines, des forêts sinistres… Les quelques interludes de bonheur auprès d’une famille de biches ou d’une jeune fille ne seront que de courte durée. Car vivre ici, c’est souffrir.
Un album totalement muet, un gaufrier immuable de 6 cases égales par page, un noir et blanc abrupt et sans gris, et des chapitres à la numérotation décroissante comme un compte à rebours vers l’inéluctable… Ce one-shot de Cornette (Au centre du Nowhere, Les Gens urbains, Les Passe-murailles…) et Jürg (À l’ombre des étoiles, Tête de nègre, Twist and shout…) ne fait pas dans la dentelle, il avance, brutalement, dans un univers de désolation. Une jungle de pourriture et de sang séché, où l’innocence n’a plus sa place. Récit d’apprentissage d’une petite créature vierge comme un nouveau-né, Ziyi est aussi un exercice de style de noirceur plutôt bien maîtrisé, du moins graphiquement. Car le vrai défaut du livre, par ailleurs fort joliment édité par Scutella, est un manque de densité narrative : l’histoire s’étend sur 136 pages alors qu’elle n’a de la matière que pour récit bien plus court; plusieurs scènes proposent des cases inutiles, freinant artificiellement l’action, et certaines séquences sont redondantes. On aurait préféré un nouvelle plus ramassée – le coup de poing dans l’estomac n’en aurait été que plus violent. Et la lecture davantage troublante.
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