Amour à mort ***
Par Huangjiwei Jean-David Morvan et. Glénat, 13,90 euros , décembre 2012.
Il y a des œuvres qui posent des cas de conscience à certains rédacteurs. En voici une qui peut se vanter de collectionner les superlatifs : ambitieuse, somptueuse, voluptueuse même ! Une démonstration graphique de haute volée où le soin maniaque des décors ne paralyse jamais le dynamisme de personnages en état de grâce, dans des scènes d’action aussi épiques que lyriques. Le tout porté par un scénario à la fois simple et fluide, une belle tragédie où l’amour passion triomphe de bien des obstacles. Bref, Amour à mort est une très belle œuvre… Mais une œuvre partiellement blessée.
Au delà d’une jolie couverture montrant l’indéniable talent de son auteur chinois à manier les couleurs numériques, ce one-shot dévoile avant tout sa grande maîtrise du noir et du blanc… handicapée par une mise en couleurs made in France monochrome et monotone ! Le lecteur semble alors voyager dans le temps, non par la magie d’un récit sur fond de médiéval fantastique, mais pour remonter jusqu’au milieu des années 90 ! Une époque pas si lointaine où nombre d’éditeurs américains s’évertuaient à coloriser des mangas afin de toucher un public soit disant plus large… La plupart des mangas étant édités en noir et blanc au Japon, les ombres et autres ambiances étaient alors mises en scène à coups de hachures et de trames mécaniques. La couleur made in USA venant se greffer sur leurs planches donnaient la plupart du temps des résultats grisâtres et monochromes.
En lisant Amour à mort, on s’aperçoit alors qu’il s’agit probablement du même processus : des planches « fonctionnant » déjà en noir et blanc, mais auxquelles on y a greffé de force une mise en couleurs qui, en soi, ne démérite pas (et parvient même à offrir une jolie ambiance sur certaines cases, mais qui dans l’ensemble, peine à trouver sa place, malgré la bonne volonté évidente des créateurs de sortir de la mode actuelle de l’association heroïc fantasy = couleurs flashy. Ainsi, le travail du coloriste n’est pas purement et simplement à blâmer. Mais comme le café et le jus de tomate, séparément, ils peuvent êtres délicieux; ensemble, on a connu mieux comme cocktail expérimental !
Que faire alors ? Comment juger un si bel ouvrage partiellement gâché, et narrant l’existence de haine et de vengeance d’une héroïne brodant chaque épisode de sa vie sur sa robe de mariée ? Comment être touché par une guerrière qui aime et qui hait tout autant l’homme qui a détruit sa vie, mais dont les nuances des sentiments se perdent dans une monotonie « colorisée » et donnant l’impression d’un immense flashback de 56 pages ? Après discussion avec la rédaction, nous en sommes venus à la conclusion que l’on ne peut discréditer le sublime travail de Huangjiwei, et les belles envolées lyriques et passionnelles de Jean David Morvan, sous prétexte de déplorer une volonté artistique sincère mais bancale de faire « différent ». Nous laissons le lecteur juger de la pertinence de la chose. Car il est reste avant tout un magnifique et émouvant ouvrage, prouvant que les belles histoires sont universelles entres les artistes de différents pays, ici la France et la Chine…
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