Armand
Insaisissable Armand. Petit truand de banlieue bas du front ? Artiste peintre et génie en devenir ? As de la manipulation et ange de la vengeance ? Ou simple chat noir attirant les emmerdes ? Armand est sans doute un peu tout ça, et bien d’autres choses aussi. Insaisissable, on vous dit.
Après des années à oeuvrer aux destinées de l’éditeur The Hoochie Coochie, Gautier Ducatez a repris sa plume et son encre d’auteur, pour peaufiner un polar atypique et bluffant, à la fois portrait de la jeunesse d’une époque (la sienne, au tournant des années 90-2000) et récit de genre. Dans un petit format carré, se développe une narration dense, faussement chorale, mêlant des témoignages « face caméra » comme si on assistait à un documentaire sur le personnage-titre, et des séquences plus classiques, dans lesquelles on voit évoluer ce bandit artiste au crâne rasé. Avec autour de lui une galerie de protagonistes farfelus mais convaincants, comme ce fascinant faussaire alcoolique ou ces petits truands de banlieue, aussi violents que minables – les dialogues pleins d’argot et de verlan participent grandement à la réussite de cette mise en scène étudiée. Et fort de cette structure narrative complexe et elliptique, l’auteur de Capra Carnifex tisse une intrigue de mensonges et faux-semblants très maligne. Son dessin hachuré, aux noirs puissants et au trait oscillant entre tension et lâcher prise, produit un univers noir et brutal, mais paradoxalement assez chaleureux, au sein duquel on adore se perdre. Une excellente surprise au rayon polar, rayon qui ressasse trop souvent les mêmes recettes : ça fait du bien.
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