Boy meets Maria
Il y a foule lors la représentation du club du théâtre du lycée. À raison, Maria, une jeune recrue de la troupe, met le feu aux planches et illumine la scène par sa beauté et sa présence scénique. Comme pour de nombreux autres spectateurs, le sang de Taiga ne fait qu’un tour. Pour lui, c’est le coup de foudre et il court l’annoncer à celle qui a volé son cœur. C’est finalement la douche froide : Maria se révèle être un homme.
Dans cette société japonaise où l’homosexualité n’a pas encore sa place, il est difficile d’aller à l’encontre du courant. Qu’importe, Taiga ne se laisse pas écraser par les normes et les dires de ses camarades qui ne l’aident pas à assumer ses choix. Il aime Maria, ou du moins la personne qui se cache sous son costume. Il s’intéresse à elle. Les deux se rapprochent et révèlent leur passé compliqué. L’absence d’une mère et la lâcheté d’un père pour l’un, la pression familiale et l’abus pour l’autre. Présentant une dysphorie de genre, Maria ne se sent pas femme, mais ne s’assume pas homme non plus. Né avec un sexe masculin, sa famille l’a poussé à porter des robes et à être la bonne petite fille de la famille… Pas facile de trouver sa place dans ces conditions.
Interrogeant l’identité de genre, la mangaka va beaucoup plus loin avec Boy meets Maria. Son one-shot se construit autour de traumatismes d’enfances qui se répercutent chez des adolescents à l’aube de l’âge adulte. Tentant tant bien que mal de se dépêtrer de leur passé, Taiga et Maria s’entraident mutuellement vers le chemin de la résilience. C’est certes parfois raconté de manière un peu maladroite, mais ce sont des erreurs de jeunesse et surtout portées par de très bonnes intentions, donc facilement excusables. L’autrice emploie par exemple un excès de bonne humeur, cependant cela permet aussi au récit de respirer et d’éviter le pathos.
Toute première bande dessinée de Peyo, une autrice décédée à seulement 23 ans, Boys meets Maria est à la fois une grande réussite et une déception. Une grande réussite pour un démarrage de carrière, car on est sur une œuvre solide à bien des niveaux. Une déception, car ce manga en augurait bien d’autres à venir de la part d’une artiste qui avait des choses à dire. D’autant plus qu’elle faisait déjà preuve d’une maturité graphique dont la modernité n’était pas formatée. Une sorte d’entre-deux élégant entre le trait de Mizu Sahara (My Girl, Le Chant des souliers rouges…) et la mouvance menée par Makoto Shinkai (réalisateurs de longs-métrages comme Your Name., Les Enfants du Temps…).
Boy meets Maria © PEYO 2018 – Traduction : Isabelle Eloy
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