Corps de pierre ****
Par Charlie Adlard et Joe Casey. Delcourt, 13,50 €, le 23 juin 2010.
Est-ce le stress qui paralyse les doigts de Tom, pianiste de jazz au bout du rouleau ? Son divorce est en cours et sa carrière au point presque mort. On comprendrait que la colère et le ressentiment soient à l’origine de ces douleurs et de cette lourdeur qui assaillent sans prévenir son corps massif. Mais non, c’est une maladie inconnue qui le ronge : son corps se transforme peu à peu en pierre…
Si le début de ce one-shot laisse entrevoir les prémices d’une histoire super-héroïque, la suite démontre qu’il n’en est rien. Même si le coeur de notre héros meurtri n’est pas fait de pierre – comme on le pense au départ – et qu’il recèle énormément d’amour et de don de soi. Ce qui le conduira à agir en héros, une seule fois, dans un sacrifice superbe salué par la communauté. Mais Corps de pierre n’est pas un comics spectaculaire avec des super-vilains à combattre. C’est une histoire intimiste et touchante, celle d’un homme sur qui pèse une hérédité trop lourde à porter : une maladie mystérieuse et une sociabilité compliquée. Le dessin, tout en traits flottants et sans ombre, fait régner sur l’album une atmosphère douce-amère, à la fois légère par l’absence d’aplats noirs et terrifiante par son aspect squelettique. Une prouesse signée Charlie Adlard, à des lieux du style réaliste que l’artiste adopte pour la série Walking Dead. Le scénariste Joe Casey (à la carrière bien remplie, avec notamment des participations à Wildcats, Uncanny X-Men ou G.I. Joe) a réussi à manipuler les codes de la BD d’action pour raconter le destin empreint de fatalité d’un homme a priori banal. L’ensemble est d’une efficacité redoutable et d’une poésie rare. Corps de pierre est une pépite.
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