Crevaisons ***
Par Daniel Casanave et Manu Larcenet. Dargaud, 10,40 €, le 20 mars 2009.
Ebenezer Raidart est un gardien de cimetière consciencieux. Seul, il veille soigneusement sur ses tombes. Et trompe le silence en passant à fond les ballons des chansons punk qui le font vibrer. Tenaillé par la faim, et comme son ravitaillement tarde à arriver, il décide d’aller en ville « pour éviter de ressembler à ses pensionnaires ». Et ce qu’il découvre lui fait froid dans le dos: pas âme qui vive et des stèles, partout, témoignant d’une véritable hécatombe. De retour dans son logis, il tombe sur le lieutenant De Groin-Embrenne, revenu d’entre les morts, qui n’est autre que le Soldat inconnu…
Riche concept que celui exploré par Daniel Casanave (dessinateur aux productions gorgées de fraîcheur et de dynamisme) et Manu Larcenet qui, dans la série Une rocambolesque aventure de…, s’étaient déjà attaqués de concert à Attila Le Hun (Le Fléau de Dieu). Avec une jolie dose de fantaisie, les deux compères laissent vagabonder leur imagination, créant un huis clos morbide, et pourtant souvent joyeux. Malgré certains épisodes tragiques – la poignante description de la guerre par le Soldat inconnu, qui se demande ce qu’on peut « espérer d’un gamin de 23 ans dans les tranchées, à part se faire tuer ou tuer sans faire d’histoires » -, on rit en suivant les péripéties de ce duo atypique. On referme l’album en réfléchissant tout de même à ce futur abêtissant et insensible que décrivent les auteurs, où les slogans (« Se souvenir n’est pas produire », « Honorer des défunts, c’est négliger son gagne-pain ») effraient par un je ne sais quoi de familier…
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