Edouard Manet et Berthe Morisot
« Il n’y a qu’une chose vraie : faire du premier coup ce qu’on voit. Quand ça y est, ça y est. Quand ça n’y est pas, on recommence. Tout le reste est de la blague ! » C’est par ces quelques mots qu’Edouard Manet définit son art, et plus généralement l’état d’esprit des impressionnistes. Comme beaucoup d’entre eux, Manet est décrié par la critique : son « bain » est jugé obscène, son Olympia ne s’en tire guère mieux et certains sujets politiques n’attirent pas la bienveillance du Paris bien pensant du Second Empire dans lequel Manet évolue. Quand ce n’est pas sa technique qui est attaquée, jugée approximative et hors norme.
Dans ce contexte, Edouard Manet croise dans les salles du Louvre les soeurs Morisot, peintres elles aussi. Entre Berthe et Edouard se noue une relation d’amour et d’amitié, mais aussi une émulation artistique et intellectuelle. Mais comment vivre cette « passion impressionniste » (sous-titre de l’album) quand la bienséance et les codes moraux semblent tout interdire ?
L’angle sentimental choisi par Michaël Le Galli (La Guerre des OGM, Batchalo… ) est pertinent : il évite l’effet linéaire, souvent le propre de la biographie, et permet à la BD de gagner en originalité. La vocation de l’ouvrage est essentiellement instructive : l’art impressionniste, le tollé qu’il provoqua dans les salons du Second Empire, le soutien de Baudelaire ou Zola… La personne de Berthe Morisot n’est pas secondaire : elle incarne une voie féministe difficile à tracer en ce XIXe siècle. La BD reste cependant très sage et seul le sujet, dans son contexte, reste sulfureux : la « passion » ne semble, au final, n’être que dans le titre. Le trait de Marie Jaffredo est délicat et doux, tout comme la lumière qui baigne les planches d’une lumière toute… impressionniste ! Mais là encore, cela reste très sage, au point de nuire au dynamisme narratif et à l’expressivité des personnages, sensés être des passionnés. Un BD qui vaut essentiellement pour sa pédagogie et les connaissances qu’elle transmet, et c’est déjà bien.
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