Emilie voit quelqu’un
« Je vous le dis tout de suite : si vous êtes venue chercher un arbre pour vous accrocher aux branches, vous vous êtes trompée de personne. » Elle est comme ça la psy d’Emilie, pas vraiment aimable, ni tout à fait réconfortante au premier abord. Mais efficace, apparemment… La jeune femme au chignon strict, aux faux airs de Mary Poppins, vient de se décider à consulter. La faute à un autodiagnostic inquiétant : « je viens d’avoir trente ans et j’ai envie de mourir tellement je n’arrive à rien dans ma vie », indique-t-elle. Un petit ami pas vraiment dynamique, des amis vivant dans une « pitoyable médiocrité », selon leurs mots, des élèves épuisants, une soeur parfaite et moralisatrice, des parents culpabilisants… Une accumulation de frustrations, notamment, qui la mènent vers la dépression.
D’un sujet intéressant, on craint d’abord que les auteures tirent un album humoristique un brin grotesque. La description du compagnon d’Emilie (un post-ado décérébré qui s’abrutit de jeux vidéo et ne comprend rien), ou encore un traitement graphique à l’expressivité caricaturale un peu facile. Mais, au fil des pages, Emilie voit quelqu’un gagne en intensité et en finesse — sans perdre en fantaisie. A travers l’expérience de leur héroïne, la scénariste Théa Rojzman et la dessinatrice Anne Rouquette (Histoires de filles) détaillent plutôt finement l’ascenseur émotionnel que génère la fréquentation d’un psy, pour la première fois, et exposent bien la détresse d’une dépressive — même si elles ne s’attardent pas sur les causes du mal-être d’Emilie. S’il n’est pas renversant, leur ouvrage sonne juste, assez régulièrement.
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