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Emre Orhun gratte un bain de sang

10 novembre 2010 |

ohrun_introDes ambiances sombres, graphiquement époustouflantes. Voilà dans quoi nous plonge Emre Orhun avec Erzsebet. Scénarisé par Cédric Rassat, l’ouvrage détaille la carrière criminelle de la comtesse hongroise Erzsebet Bathory, qui était persuadée que seul le sang de jeunes femmes pouvait l’empêcher de vieillir. Adepte de la carte à gratter, le dessinateur de 34 ans raconte son héroïne et sa technique préférée.

erzsebet_1Qui est Erzsebet Bathory selon vous?
Je la perçois comme un être humain qui a peur de vieillir – ce qui est le cas de beaucoup d’entre nous. Sauf qu’elle ne l’accepte pas. Son esprit malade invente une solution : se baigner dans le sang de jeunes vierges empêchera son corps de changer. L’histoire d’Erzsebet est à la base de plusieurs légendes vampiriques, dont celle du comte Dracula. Elle vivait à la fin du XVIe ou au début du XVIIe siècle, dans une contrée un peu barbare. A l’époque, la Hongrie était à la limite de l’Empire Ottoman. Et les droits de l’homme n’y étaient pas défendus : il était commun pour les nobles d’infliger des cruautés aux inférieurs.

Vous êtes-vous beaucoup documenté sur votre héroïne?
J’ai lu deux livres sur elle, dont celui de Valentine Penrose, La Comtesse sanglante. J’ai revu Nosferatu de Murnau, et deux versions cinématographiques de Dracula, par Tod Browning et Francis Ford Coppola. J’ai aussi étudié des visuels des châteaux et habits de cette période. Ensuite, j’ai laissé libre court à mon imagination. Mon style n’est pas réaliste, et de toute façon le scénario de Cédric Rassat était plus proche du conte médiéval que du fait divers historique.

erzsebet_2En avril dernier est sorti dans les salles La Comtesse, un film de Julie Delpy sur le même sujet. S’agissait-il d’une coïncidence?
Oui, totalement. Quand Cédric et moi avons commencé à réfléchir à notre projet, il y a trois ans, nous avons appris incidemment que Julie Delpy préparait un long-métrage sur un thème semblable. Mais nous ne savions pas si ça allait aboutir, ni quand.

Comment avez-vous rencontré Cédric Rassat, le scénariste de l’album?
Nous sommes tous deux lyonnais, et avons lié amitié via une connaissance commune. Cédric était à l’époque en train de travailler sur Charles Manson pour Glénat. Quelqu’un lui a soufflé le nom de cette autre tueuse en série que fut Erzsebet, et il s’est lancé.

Pourquoi utilisez-vous la carte à gratter?
Je l’ai découverte il y a une quinzaine d’années, en lisant une BD de Thomas Ott. J’ai aimé l’univers sombre, surréaliste, que cela pouvait créer. J’ai essayé et ça m’a vite séduit: j’adore le côté magique du dessin qui se révèle et surgit progressivement du noir. Et puis j’apprécie le côté minimaliste de cette technique : il faut très peu d’outils.

Comment travaillez-vous, concrètement?
Je recouvre un carton blanc d’encre noire, puis je gratte avec un outil pointu afin de faire apparaître le blanc dessous. Comparé au dessin, le travail se fait à l’envers : on montre progressivement la lumière. Tout est basé sur les hachures, il faut donc être très patient, amener les contrastes progressivement. Aucune place n’est laissée à l’improvisation, car les repentirs sont difficilement possibles. Il faut soigneusement prévoir son coup, préparer les crayonnés à l’avance, et savoir exactement quelles zones seront grattées.

erzsebet_3Quel est votre parcours?
Je suis fils de diplomate, né en Chine mais de nationalité turque. J’ai vécu dans plusieurs pays européens, et ai appris à parler français en Belgique. Je suis venu à Lyon pour suivre des études d’architecture, mais j’ai changé d’avis : comme les cours de dessin me plaisaient énormément, je me suis inscrit à l’école Emile Cohl. J’ai longtemps illustré des ouvrages jeunesse, et dessiné pour la presse – ce que je continue de faire. Mais je gardais dans un coin de ma tête l’envie de faire de la bande dessinée, pour pouvoir travailler sur un long format. Ma rencontre avec Cédric Rassat a permis de la concrétiser.

Quels sont vos projets?
Rien de bien concret pour le moment. Un autre album avec Cédric, sûrement. J’aimerais aussi entièrement développer une histoire moi-même. Et puis continuer l’illustration, et exposer mes dessins…

Propos recueillis par Laurence Le Saux

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Erzsebet.
Par Emre Orhun et Cédric Rassat.
Glénat, 15 €, le 13 octobre 2010.

Images © Glénat.

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Commentaires

  1. ce travail a l’air magnifique!

  2. ce travail a l’air magnifique!

  3. Francis Pincemoi

    Trés beau dessin, ce dessinateur sait dessiner! Quel travail! Cela nous change agréablement des blogs baclés en trois coups de crayon, et dont plus personne n’a rien à faire.

  4. Francis Pincemoi

    Trés beau dessin, ce dessinateur sait dessiner! Quel travail! Cela nous change agréablement des blogs baclés en trois coups de crayon, et dont plus personne n’a rien à faire.

  5. Josquin

    Il suffit pas de gratter et de tenter de « faire beau » (tu parles), il faut que le dessin soit solide, et là le dessin ne tient pas du tout, c’est du boulot d’amateur (amateur doué, mais amateur quand même). Il faudrait apprendre à dessiner avant de faire de l’esbrouffe technique pour maquiller ses lacunes.

  6. Josquin

    Il suffit pas de gratter et de tenter de « faire beau » (tu parles), il faut que le dessin soit solide, et là le dessin ne tient pas du tout, c’est du boulot d’amateur (amateur doué, mais amateur quand même). Il faudrait apprendre à dessiner avant de faire de l’esbrouffe technique pour maquiller ses lacunes.

  7. Francis Pincemoi

    Je vous trouve bien dur, j’aimerai bien avoir le même talent (et la même patience). Pour l’instant, avec beaucoup d’efforts, je n’arrive à faire que du Sfar ou du Trondheim!!

  8. Francis Pincemoi

    Je vous trouve bien dur, j’aimerai bien avoir le même talent (et la même patience). Pour l’instant, avec beaucoup d’efforts, je n’arrive à faire que du Sfar ou du Trondheim!!

  9. @Josquin : Je trouve ce commentaire affreusement réducteur. On sent bien ce que vous attendez d’un dessin de BD, et ce sont malheureusement ces goûts sans originalité qui nous valent toutes ces bandes dessinées sans originalité. Le trait d’Orhun, qui n’est pas sans rappeler une certaine école de l’illustration jeunesse, et l’expressivité pure de la technique utilisée, donnent à l’arrivée un dessin dont la puissance d’évocation dépasse largement l’immense majorité de ce que la bande dessinée actuelle parvient à proposer. Je suis heureux qu’un tel album puisse sortir chez un gros éditeur, et triste qu’il puisse être accueilli avec un tel mépris par un soi-disant bédéphile.

  10. @Josquin : Je trouve ce commentaire affreusement réducteur. On sent bien ce que vous attendez d’un dessin de BD, et ce sont malheureusement ces goûts sans originalité qui nous valent toutes ces bandes dessinées sans originalité. Le trait d’Orhun, qui n’est pas sans rappeler une certaine école de l’illustration jeunesse, et l’expressivité pure de la technique utilisée, donnent à l’arrivée un dessin dont la puissance d’évocation dépasse largement l’immense majorité de ce que la bande dessinée actuelle parvient à proposer. Je suis heureux qu’un tel album puisse sortir chez un gros éditeur, et triste qu’il puisse être accueilli avec un tel mépris par un soi-disant bédéphile.

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