En temps de guerre
La guerre, c’est terrible, ça tue les hommes. Mais surtout, ça laisse les femmes toutes seules à l’arrière, avec une tonne de boulot et les gosses à gérer. Enfin, à l’heure de l’effort de guerre, les enfants finissent pas accompagner les mamans à l’usine d’armement, où on leur trouvera des tâches adéquates. Le temps passe ainsi, et une nouvelle société au féminin se met en place. Entre liberté retrouvée, douleur de l’attente, crêpage de chignons et solidarité nouvelle…
Ce deuxième album de Delphine Panique (après Orlando, déjà chez Misma) évoque bien entendu la vie loin du front lors des grands conflits, surtout la Première Guerre mondiale. Mais en adoptant un point de vue décalé et une esthétique fantaisiste – ses héroïnes ont une maisonnette en guise de tête, et une mignonne petite queue au-dessus du fessier –, elle délaisse le documentaire pour proposer une vision drôle et engagée. Ses ouvrières prennent leur vie en main en prônant l’autogestion, ses marraines de guerre qui correspondent avec des soldats lisent à haute voix de coquines lettres d’amour pour le bonheur de leurs copines, et les virées nocturnes sont l’occasion de se trouver un hobby, voire une passion. Avec humour et intelligence, Delphine Panique alterne le poignant, le cocasse et le douloureux, au fil de courtes saynètes comme autant d’instantanés de la vie loin des tranchées. Son trait fin et ses couleurs lumineuses, qui ne s’encombrent que rarement de décors en privilégiant les protagonistes, donnent à l’ensemble une petite touche irréelle délicate et envoûtante. Voilà un album singulier et attachant, encore une jolie réussite des éditions Misma.
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