Fleurs de pierre #1
1941. Dans les petits villages de Yougoslavie la vie est encore paisible, coupée des horreurs guerrières qui sévissent dans la capitale et dans le reste de l’Europe. Regrettablement, Krilo et sa classe sont pris par surprise : lors d’une sortie scolaire, ils sont mitraillés par un avion allemand. Cet événement tragique marque la fin de l’innocence pour le peu de survivants qui restent. Krilo découvre alors la guerre, la difficulté de vivre au quotidien, les nazis, la résistance… Et tente de sauver son amie Fi, d’abord déportée en camp de concentration, puis accaparée par Meisner, un important officier de la Wehrmacht qui grime sa prisonnière sous les traits de sa sœur décédée.
Fleur de pierre fait partie des premiers titres adultes à nous être parvenus par le biais de Jacques Glénat. Sens de lecture français, grand format cartonné, l’éditeur grenoblois avait déjà perçu le potentiel de cette œuvre et l’avait publiée aux éditions Vents d’Ouest dans le même format qu’Akira ou The Ghost in the shell, dès 1997, juste après l’échec de Version (1996 – 1 tome paru sur 3 en France) et en parallèle de son chef-d’œuvre Ikkyū. Tout comme Fleurs de pierre, ces deux séries seront d’ailleurs également rééditées par les éditions Revival. L’éditeur croit en son auteur et le soutiendra sur le long terme, car il annonce également la publication du recueil d’histoires courtes Récits des douze couleurs (inédit en France).
Pour en revenir à la série qui nous intéresse ici, il n’est pas surprenant de la revoir paraître 25 ans plus tard dans un format proche, avec un dos rond, mais dans son sens de lecture original, tant les planches nouvellement numérisées par l’éditeur japonais Kadokawa, l’impression impeccable et le grand format rendent hommage au dessin fouillé de l’auteur. À la lecture, il est évident que ce récit avait tout pour plaire à un lectorat franco-belge. Son histoire européenne, sa thématique qui remplit encore et toujours les bibliothèques des lecteurs, son traitement particulièrement posé et adulte par rapport à l’image que l’on avait du manga à l’époque… Force est de constater que près de 40 ans après ses débuts, cette série garde toute sa pertinence. On se laisse embarquer dans le récit et on adhère immédiatement à cette « petite » histoire, qui, bien que fabriquée de toutes pièces, permet de mettre encore et toujours en avant l’horreur de la guerre. De par son angle de représentation différent de ce qu’on a l’habitude de lire, son intrigue de résistance et d’espionnage, ses atours romanesques permettent à la « grande » Histoire de prendre corps par la lorgnette d’une aventure singulière.
D’abord annoncé à 35 €, puis finalement vendu 29 €, l’ouvrage de 300 pages reste onéreux et réservera sa découverte aux plus aisés. Dans un sens, on peut se réjouir que le rythme de sortie annoncé des 5 tomes de la série ne soit que biannuel, surtout que celle-ci sera publiée en alternance avec les tomes d’Ikkyū jusqu’en juin 2025. On aura donc largement le temps de (re)découvrir le travail de cet auteur tristement décédé d’un infarctus du myocarde à seulement 49 ans, juste après avoir fêté avec son éditeur la livraison de l’illustration couleur de la couverture du dernier tome de sa dernière série.
© Hisashi Sakaguchi, 2021- Traduction : Ilan Nguyên
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