Woan est un jeune Apache doué avec un arc, mais qui manque de chance et de self-control. Parti chasser, le jeune garçon provoque une ourse, qui tue d’un coup de patte l’ami qui l’accompagnait. Accusé d’avoir irrité les esprits de la nature, le voilà banni de son clan et condamné à une vie solitaire. Devenu adulte, il ralliera le chef de guerre Geronimo, qui ne courbera jamais l’échine ni face aux Blancs ni face aux Mexicains.

On attendait beaucoup de ce nouvel album de Christian Rossi, publié dans un grand format majestueux. Une édition élégante, qui rend grâce au travail graphique exceptionnel du dessinateur du Coeur des amazones, Deadline ou W.E.S.T.. Maître des encres colorées et d’un trait réaliste jamais figé, bien ancré dans une tradition classique et un décorum western hollywoodien, l’auteur développe de nouveau ici son style flamboyant, dont les mille nuances de teintes – du sépia le plus éthéré au bleu le plus profond – font de chaque planche une petite oeuvre d’art. Cependant, la bande dessinée, c’est aussi et avant tout des histoires, et celle de Golden West se révèle bien décevante.

En effet, la trajectoire de Woan, valeureux guerrier dans les pas du légendaire Geronimo et témoin de l’extinction de son peuple, manque vraiment de souffle et de rythme. La faute à une voix off pesante, à des temps morts trop longs, à des ellipses très étranges et à un découpage parfois aléatoire. Mais aussi de gros soucis d’incarnation : on ne croit pas assez à ses personnages, on ne tremble pas avec eux, et on finit, au bout de cette éreintante fresque de 174 pages, par se désintéresser de leur destin – et on se demande bien quelle mouche a piqué l’auteur pour baptiser ses chercheurs d’or Tom et Jerry… Le sens du propos de Christian Rossi s’est noyé dans sa contemplation des décors de western et dans les souvenirs de films de John Ford, et on ne comprend pas très bien où il veut en venir. Et la comparaison avec le Hoka Hey ! de Neyef, qui donnait un vrai coup de fouet au genre l’an dernier, sera hélas impossible à éviter. Christian Rossi est un immense dessinateur, mais sans doute aurait-il eu besoin d’un(e) scénariste sur ce projet.