Groenland Vertigo
Georges a de la chance : il est invité à participer à une expédition au Groenland, sur un navire embarquant des scientifiques et des artistes, dont le fameux écrivain Jørn Freuchen, dont il a adapté les Bobards arctiques en bande dessinée. Mais voilà, il ne parle pas danois, est sacrément maladroit, n’a guère le pied marin et devient, comble de la malchance, le confident d’un détestable plasticien allemand, persuadé qu’on fomente un complot contre lui…
Le héros gaffeur de ce délicieux album, c’est évidemment l’alter ego de l’auteur, Hervé Tanquerelle. Qui a véritablement participé à un tel voyage au Groenland, en compagnie de Jorn Riel, auteur des Racontars arctiques qu’il avait transposés avec Gwen de Bonneval. Mais comme il estimait ne pas avoir réuni assez de matière pour produire une vraie BD reportage, Tanquerelle a choisi la fiction. Son Racontar à lui, en somme. Idée parfaite, d’autant que rapidement l’hommage à Hergé et à son Étoile mystérieuse en particulier, a paru évident. Avec sa ligne claire mais pas trop, des décors expressionnistes de toute beauté et l’apport subtil des couleurs d’Isabelle Merlet, Groenland Vertigo développe un graphisme fin et malin, plus grand public que les précédentes BD de Tanquerelle (Les Faux visages, Les Voleurs de Carthage…), dans une lignée hergéenne moderne car non figée. Et l’histoire est à l’avenant, pleine d’humour piquant et de rebondissements, rythmée par la vision de beaux paysages, un suspense palpable et des séquences purement cocasses (la quête du whisky congelé est hilarante). L’album est un régal, le grand coup de coeur fédérateur de cette rentrée 2017.
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D’un côté, il y a les candidats de Top chef qui revisitent la poule au pot ; de l’autre, il y a les dessinateurs qui revisitent L’Etoile mystérieuse. Tanquerelle appartient plutôt à la 2ème catégorie. D’ailleurs, il se prénomme Hervé : il n’est donc qu’à une seule lettre – ce qui est peu et beaucoup – d’Hergé.
Ensuite, il y a ceux qui cèdent aux plaisirs de la nostalgie, qui voudraient avoir encore dix ans, comme Alain Souchon par exemple, et puis ceux qui vont rechercher leurs Tintins au grenier pour leur dessiner une barbe et des rides. Là encore, Tanquerelle appartient plutôt à la 2ème catégorie. Encore que.
En fait, sa BD réussit une chose impossible puisqu’elle permet à la fois de redevenir un enfant et de vérifier qu’on a vieilli, que tout le monde a vieilli, les lecteurs de BD, les auteurs, l’Arctique, le whisky, les prophètes : même Tintin a vieilli. Et Milou est mort.
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