Hobo Mom
Aux États-Unis, les hobos, vagabonds volontaires rendus célèbres par les récits de Jack Kerouac ou Jack London, sont un symbole de liberté. Des hommes (et quelques femmes) qui ont choisi de glisser hors des rails bien proprets de la société occidentale, pour prendre ceux qui serpentent le pays, au hasard des trains de marchandises et des rencontres. Comme happés par un vent trop fort, un besoin irrépressible de se défaire des attaches que l’on s’échine à nouer soi-même depuis l’enfance et qui se resserrent irrémédiablement à l’âge adulte.
C’est le coeur de cette courte et taiseuse bande dessinée, imaginée par le Belge Max de Radiguès (Orignal) et l’Américain Charles Forsman (Celebrated Summer). Tasha erre d’État en État, luttant pour sa survie en dissimulant ses cheveux longs sous une casquette, et sa poitrine sous une veste épaisse. Mais, poussée par le destin, ou un frémissement d’instinct maternel, elle retourne dans la maison qu’elle a quittée des années plus tôt. Et retrouve un mari blessé et déçu, bien qu’encore amoureux, et une petite fille qui aurait bien besoin d’une maman…
Avec une belle économie de moyens, tant dans la ligne claire et limpide que dans les dialogues rares et concis, les deux auteurs proposent une histoire bouleversante. Dont la sobriété apparente tranche avec le déferlement de sentiments contradictoires dans l’esprit de cette jeune femme qui, malgré l’amour qu’elle porte à sa progéniture, n’arrive pas à s’envisager maman au quotidien. L’appel de la liberté et de la solitude est trop puissant. Par son choix de mise en scène, évitant le pathos ou les inutiles explications, Hobo Mom est un modèle de narration réussie, au service du sens et des émotions. Bravo.
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