Holy Wood
Norma débarque un jour à Holy Wood, sombre et inquiétant bois de conifères, dans l’espoir de devenir enfin quelqu’un à travers le cinéma. Car c’est là-bas que naissent les étoiles. Mais confrontée aux refus, Norma se décourage peu à peu, entre son handicapant bégaiement et des photos faciles. Jusqu’au jour où, repérée par l’étrange couple Wilcox, sa carrière décolle enfin. Ou file plutôt…
Le sous-titre, qui pouvait inspirer la crainte, a le mérite de la clarté : Portrait fantasmé de Marilyn Monroe. L’actrice occupe en effet le cœur de la BD mais ce serait injuste de n’y voir que cela. Car l’auteur Tommy Redolfi, au-delà de la critique du star-system, de la société du spectacle et de sa vanité, signe bien plus qu’une simple biographie romancée et fantasmée. Avec talent, il décrit un monde inquiétant, la mystérieuse forêt d’Holy Wood, qui enfante des carrières autant qu’elle les brise. Malheur à celles et ceux qui croient pouvoir exister à travers l’image qu’ils renvoient sur grand écran.
Plus que l’histoire, c’est bien l’univers déployé par l’auteur qui confère de l’intérêt à cet album : objet de désir, jouet d’une histoire qui la dépasse, Norma devenue Marilyn dessine un miroir aux alouettes. Ses souvenirs angoissants de petite fille remontent à la surface pour la confronter à ses démons. À un complot. Dans un premier chapitre de haut-vol, Redolfi nous immerge, distille l’inquiétude, l’effroi et sème le doute. À l’image d’une présence graphique intéressante. Les cent premières pages ménagent ainsi du suspense et imposent un univers glauque assez fort. Mais la longue seconde partie (150 pages), plus convenue sur les dangers de la célébrité ou l’identité en trompe l’œil, gâche un peu le plaisir. On ne s’ennuie jamais vraiment, les ambiances graphiques étant réussies et la technique narrative au point. Plus d’audace dans la seconde partie en aurait fait un très bel album.
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