Hypericon
Étudiante italienne émigrée à Berlin le temps de se charger de l’organisation d’une remarquable exposition consacrée aux trésors de Toutânkhamon, Teresa a tout de l’étudiante modèle. Celles qu’on jalouse ou que l’on admire, c’est selon. Ruben, lui, au contraire, est rêveur, bohème, il procrastine, se laisse porter au gré du vent et de l’envie. Ces deux n’ont rien en commun, mais vont pourtant faire un bout de chemin ensemble.
Si Ruben prend la vie comme elle vient, Teresa est une grande angoissée. Elle passe ses nuits d’insomnies à parcourir le journal authentique de Howard Carter, archéologue et égyptologue qui a découvert le plus imposant et plus célèbre des tombeaux antiques inviolés. Par procuration, le lecteur aussi plonge dans ses écrits et découvre l’histoire derrière la découverte de la première marche d’un escalier souterrain, le premier passage, puis l’antichambre menant à l’antre de pharaon… Alternant ce témoignage en direct de la Vallée des Rois en 1922 et le quotidien berlinois à l’orée des années 2000, cette bande dessinée entremêle vie antique et moderne. Ces deux narrations se répondent, des grandes cases sans cadres de l’Égypte aux découpages plus resserrés de l’histoire européenne de Teresa et de Ruben.
Prodige de sa génération, Manuele Fior est, à l’image de Gipi, l’un des auteurs italiens dont on attend avec impatience les nouvelles parutions. Deux années après Celestia, l’auteur signe sa première bande dessinée aux éditions Dargaud. Ses peintures intenses n’ont jamais été aussi méticuleuses et expressives. Son coup de pinceau sublime, ses couleurs rayonnent, les émotions transparaissent avec vigueur sur ses visages. Les couleurs sableuses enveloppent tout au long de la lecture et retranscrivant le lien sourd et volatile qui se tisse entre histoires et individus que tout semble éloigner.
Là où l’auteur laissait clairement voguer sa plume dans Celestia, il est ici beaucoup plus structuré, plus lisible. Inspiré de sa propre expérience berlinoise à la fin des années 90, alors qu’il était qu’architecte et qu’être auteur de bande dessinée n’était encore qu’un doux rêve pour lui, Hypericon confronte différentes visions de l’existence, relie l’espace et le temps, entre romance et dévotion, sexe et universalité, dans une douce nostalgique où la solitude et l’amour rencontrent l’éternité.
Traduction : Christophe Gouevia Roberto
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