Un petit cabinet dans un coin paumé. Un bureau en désordre, une attitude faussement nonchalante… Kujō a beau paraître peu avenant au premier abord, c’est un avocat très impliqué dans ses affaires. Ne refusant aucun client, il est à leur service en faisant une distinction nette entre la loi et l’ordre des choses. La morale, n’est que le cadet de ses soucis, il n’est donc pas rare qu’il défende ce que d’aucuns pourraient considérer comme indéfendable ou qu’il se retourne vers l’avocat chez qui il a fait ses armes pour que justice soit rendue. Et pour cela, il emploie souvent des méthodes loin d’être propres et irréprochables, bien au contraire même.

Marathonien du manga, à peine après avoir terminé la série Ushijima – L’Usurier de l’ombre conclue en 46 tomes et 15 années de publication, Shôhei Manabe a enchaîné avec cette nouvelle série au long cours (et encore, c’est sans compter la poignée de séries dérivées publiée au Japon, dont deux sont encore en cours !)…  Dans Kūjō l’implacable, on retrouve tout ce qui faisait l’attrait (et parfois le repoussoir) de son œuvre phare : des personnages immédiatement imposants et charismatiques, des histoires sordides, une narration touffue, une représentation particulièrement crédible des bas-fonds de la société et des milieux interlopes.

Loquaces, mais toujours étonnamment fluides et prenants, les premiers volumes font preuve d’une grande diversité de sujets. Sans reposer sur la moindre routine, l’auteur surprend par son approche et dans la présentation continue de son personnage principal, de son passé, de sa vision de la vie. C’est un homme simple et franc, mais énigmatique, qui ne demande que très peu d’argent pour défendre ses clients et mène une vie d’ascète au sommet d’un immeuble où il a planté sa tente.

Manga pour adulte par excellence, Kujō l’implacable est de ces séries sans concessions qui bousculent par leur frontalité. Le graphisme très photographique du mangaka n’y est pas étranger, tant le réalisme des pages renvoie à l’implacable réalité. Les cas concrets qui remplissent les pages de cette série ne sont pas à mettre en toutes les mains, mais raviront ceux qui n’ont pas peur d’être bousculés.

 

©︎2021 Shohei MANABE/SHOGAKUKAN – Traduction : Sophie Lucas