L ***
Par Benoît Jacques. L’Association, 23 €, juin 2010.
La bande dessinée comme exutoire, comme un cri – intérieur d’abord et maintenant aux autres -, comme une plongée vertigineuse dans le propre mal-être de son auteur. L, c’est un peu ça mais c’est aussi bien autre chose. Une expérience fougueuse et dangereuse, pleine de traits de plume griffant la page, produisant un assourdissant tumulte noir sans pour autant écrire le moindre mot.
C’est encore Benoît Jacques qui l’exprime le mieux dans un court texte introductif. « Un jaillissement de dessins à la plume et à l’encre de Chine, crachés, grattés, noircis, jetés sur le papier sans schéma ou esquisses préalables a été l’un des territoires où se sont exprimés dans le désordre angoisse, chagrin, colère, confusion, douleur, deuil et fantasmes. » L’auteur répond ainsi à un malaise né d’une passion amoureuse et de la rupture d’un couple. Dans ce tourbillon graphique, comme autant de dessins automatiques et cathartiques, on croise un sous-marin, un lapin blanc, un chevalier fantasque, des villes impossibles, des gendarmes, Robinson Crusoé… Des corps qui s’entrelacent, se battent, se fuient, disparaissent. On est souvent perdu dans ces pages dont la création s’étend sur deux ans, et qui sont datées, comme un journal. On est perdu, remué, exténué. On ne comprend pas tout, on attrape des bribes narratives familières, on se noie dans l’encre qui noircit la page. Mais on est souvent ému et bouleversé, comme s’il on avait pénétré dans l’intimité d’un inconnu, qui se livrerait comme il ne l’avait jamais fait. Et rien que pour cela, on reste impressionné.
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Juste du gribouilli, n’importe quoi, on prend les gens pour des cons.
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Juste du gribouilli, n’importe quoi, on prend les gens pour des cons.
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