La Cité des ponts obsolètes
La Cité des ponts obsolètes est une incursion dans les rêves d’autrui : ce qui est fascinant, mais pas forcément compréhensible. L’idée est simple : Paco se rend dans la ville balnéaire d’Astromburgo pour travailler comme saisonnier dans une boulangerie et se retrouve plongé dans un univers fantastique où s’enchaînent les péripéties. Parviendra-t-il à quitter un monde dont le sens lui échappe pour retrouver la réalité (vous aurez reconnu le scénario d’Alice au pays des merveilles) ? Beaucoup de pistes sont ouvertes sans donner lieu à rien, des endroits étranges sont traversés sans retour, de nombreux personnages apparaissent comme des guides potentiels au sein de l’histoire (à la manière du lapin blanc d’Alice), mais disparaissent aussitôt…
Federico Pazos, qui signe ici son premier album en solo, instille quelques jolies trouvailles scénaristiques : des géants échoués, tels des baleines, sur une plage, une photographe de sculptures d’oiseaux, des ponts qui ne mènent nulle part… Des thèmes intéressants sont évoqués : l’enfermement du héros dans le monde imaginaire comme métaphore de l’aliénation sociale, une contestation de l’exercice grotesque du pouvoir — un roi despotique convertit une route en sentier piétonnier pour punir un chauffeur de bus qui a chanté en conduisant.
Chaque chapitre est une historiette à part, habillée d’un dégradé monochromique qui lui est propre, et introduite par une trouvaille typographique. Avec un beau trait géométrique et inventif, l’auteur multiplie les décors surréalistes et les personnages qui ressemblent à des masques. Mais tout cela paraît finalement bien vain : à peine effleurée, chaque idée est abandonnée, et le dénouement du livre ne donne pas de sens au tout. Un bel objet creux, en somme.
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