La Déconfiture #1
En juin 1940, l’avancée inexorable des troupes allemandes jette des milliers de Français sur les routes. Car depuis quelques semaines, la « drôle de guerre » est terminée, et l’armée française qui attendait le début des combats depuis septembre 1939 se trouve mise en défaite. C’est dans ce contexte qu’on cueille Amédée, soldat du 11e régiment, qui attend la Croix-Rouge sur une de ces routes de campagne symboles de cet exode. Privé de de sa moto, dont le réservoir a été percé par un raid aérien destiné à affoler les populations, c’est à pied qu’il entreprend de retrouver ses compagnons.
Pascal Rabaté (Ibicus, Les Petits Ruisseaux ou, plus récemment Vive la marée ! avec David Prudhomme) donne a voir une vision sensible de ce moment noir de l’Histoire de France où le drame intime côtoie la déroute nationale. Dans un scénario oscillant entre le burlesque et le tragique, Rabaté fait émerger des situations ubuesques qui égratignent l’état major, des petits chefs tout sauf préparés à ce conflit. Le crayonné simple, noir et blanc, presque naïf, donne une épure qui contraste avec, et renforce donc, les destins tragiques de ces hommes. Enfin, le bout de chemin parcouru par Amédée avec André, un soldat du 65e régiment, représente un joli moment de simplicité et d’humanité, de relation pudique, amicale et fraternelle, dans un monde en décomposition.
Si l’album ne révolutionne pas la vision de la débâcle et de l’exode, et réinvestit au final des thèmes classiques, il n’en reste pas moins un bel ouvrage touchant qui donne envie de poursuivre la route avec Amédée dans le second volume de ce diptyque.
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