La Véritable Histoire de Lara Canepa
Trente ans après la mort du King Elvis, Lara Canepa reçoit un mystérieux paquet d’une inconnue, Chiara Paoli. Il contient un disque, la version italienne de la célèbre chanson That’s someone you never forget. Or l’irruption de ce 45 tours dans la vie affreusement banale de Lara va faire resurgir quelques fantômes, longtemps refoulés…
Partant d’un fait divers – en août 1977, Elvis Presley est retrouvé mort dans sa villa de Graceland mais un homme lui ressemblant a été aperçu le même jour achetant un billet pour Buenos Aires, sous l’un des pseudonymes de la star, John Burrows –, l’auteur italien Giacomo Nanni (Casanova, Histoire de ma fuite, Le Garçon qui cherchait la peur...) retrace l’histoire familiale de Lara Canepa, une enfant bien élevée et respectueuse, ayant grandi dans le catéchisme et les études jusqu’à sa vie de couple ordinaire et monotone… Avec malice, Nanni floute volontairement son récit en fantasmant le réel, semant le doute sur la vérité de ce que voit le lecteur, manière de suggérer la force des non-dits, de dévoiler lentement de lourds secrets, d’avancer avec pudeur autour de ce qui ne pourrait être finalement que pure fiction. Parabole d’une vie routinière à demi-consciente, la BD disperse un doute têtu et inquiétant, révèle au compte-goutte les parties d’une toile où tout semble faire sens sans jamais donner la réponse définitive.
Étrange, le récit dérive ensuite lentement vers le surréalisme à mesure que l’on s’enfonce dans une torpeur magnifique de mélancolie et d’espoir fantasmé. Car la voix-off sait être discrète en pointant le détail évocateur, le découpage parfait pour faire résonner les voix, et la narration minimaliste pour libérer l’imaginaire. Nanni croise les trajectoires, use de la récurrence de motifs ou de scènes, multiplie les allers-retours, nous perd agréablement pour nous retrouver hébétés un peu plus loin. Très belle façon d’aborder la vie de couple à l’épreuve du temps, l’incommunicabilité ou la quête de soi. Surtout que l’auteur se met graphiquement en danger à chaque nouvel album. Il opte ici pour des lignes épurées, des pointillés, des trames fines et des couleurs sobres. Ou comment souligner avec poésie l’irréductible fatalité d’une vie lovée dans le silence et la solitude…
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