L’Épée sacrée
Revisiter, avec dans l’idée de la moderniser, la geste arthurienne ? L’idée n’est pas neuve mais pourquoi pas, à condition d’injecter dans cette affaire suffisamment de personnalité. Gabriel Rodriguez, connu pour son travail au dessin sur Locke & Key, emprunte la voie du space opera pour chercher l’inspiration et prend au passage quelques libertés par rapport au matériau d’origine. Pas d’Arthur ici, mais pour jouer les dignes porteurs d’Excalibur, une jeune amazone nommée Avalon, venue des étoiles. Merlin lui est un biker qui parcourt la planète qui sert de théâtre à cette histoire, au guidon d’une simili-Harley. La fée Morgane a les traits d’un sorcier maléfique capable de contrôler à distance un robot.
On pourrait continuer l’énumération. Les variations apportées par l’auteur sont nombreuses. Mais demeurent de simples variations. Le boulot abattu par le Chilien au dessin, seul, est admirable et certaines planches sont superbes, même si le choix d’un style-hommage à l’école Métal Hurlant donne à L’Épée de vérité une patine rétro dont on n’est pas sûr qu’elle serve vraiment le projet. Quoi qu’il en soit, c’est vraiment par son écriture que pèche le projet. Rodriguez montre assez vite ses limites en la matière, sacrifiant notamment à une très mauvaise idée de narration : le surchapitrage en courtes séquences gonfle artificiellement le rythme. Les changements de lieux et de protagonistes s’enchaînent et laissent peu de répit au récit pour respirer. Dommage, car après une mise en place laborieuse, la bataille finale qui s’étale sur une cinquantaine de pages tient toutes ses promesses et Rodriguez y laisse enfin voir ses talents de metteur en scène. Un tour de force exécuté avec une apparente facilité, à l’image des acrobaties de sa virevoltante héroïne, calquée sur la Wonder Woman de l’Âge d’or. Tout cela s’achève trop abruptement et appelait sans doute une suite qui n’est plus au programme. Regrettable.
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