Les Tuniques Bleues par…
Parmi les séries culte de l’école de Marcinelle, peu survivent encore avec un succès public. Les Tuniques Bleues est de celles-ci. Fêtant son 60e album cette année, elle a la particularité d’être toujours tenue par son presque duo d’origine – le décès prématuré de Salvérius en 1972 entraîna la prise en charge du dessin par Lambil, quatre ans après le lancement de la série.
Succès populaire basé sur un duo humoristique efficace et un fond historique original – étonnamment étiré puisque la guerre de Sécession ne dura que quatre ans ! –, développant à chaque album un détail historique, une anecdote, un personnage… La sortie d’un 60e tome devait être célébrée comme il se doit ! Et comme Lambil refuse les intégrales (qu’il voit comme une fossilisation quand l’auteur est vivant), qu’une expo Angoumoisine a déjà eu lieu et qu’une série d’albums documentaires développant la série existent déjà depuis deux ans, il restait l’album hommage !
Exercice classique de la bande dessinée, les albums hommages tournent souvent à l’auto-célébration sympathique mais sans grand intérêt. L’album présent a eu l’intelligence de ne pas vouloir rendre un hommage directement transparent à la série mais bien d’en proposer des récits inédits « vus par ». Le choix d’auteurs est assez étonnant, ne montrant aucun « grand ancien » comme cela est souvent le cas dans ce type d’objet, mais laissant la main à des auteurs ancrés dans une autre génération.
La diversité stylistique est revendiquée et intéressante : entre José Luis Munuera, Olivier Dutto ou Aimée De Jongh, il y a un monde ! Ainsi, certains vont revisiter des classiques de la série, dessiner des scènes humoristiques, quand d’autres vont montrer une Amérique réaliste, à contrepied, de manière rarement subtile mais rythmant de façon étonnante le livre. En dehors des auteurs suscités, on retrouve également Thierry Gloris, Denis Goulet & Sti, Renaud Collin, Pau & Lapière, Olivier Schwartz, Clarke, Baba & Lapuss’, Frasier & Chamblain, Zidrou et Blutch, dont le pseudo vient bien de la fameuse série (ses camarades de classe lui trouvant une ressemblance avec le caporal), qui signe aussi la belle couverture.
Le parti-pris de ce livre hommage force donc l’intérêt, mais un certain nombre de récits demeurent moyennement convaincants malgré la bonne volonté. On saluera la beauté graphique des pages de Renaud Collin (ci-dessus), malheureusement un peu trop tire-larme, le plaisir du toujours étonnant ton de Clarke ou la très bien vue réécriture de Blue Retro en une planche par Blutch (ci-dessous). Un album en dents de scie donc, comme tous collectifs, qui ravira les fans sans être indispensable. Toutefois, ces Tuniques-là paraissent plus singulières que bien des tomes d’une série qui, certes, dure avec succès, mais n’atteint plus l’originalité des débuts.
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