Ménil’Décor
Quatre personnages, quatre trajectoires singulières composent l’identité d’un « village » parisien, Ménilmontant et le 20e arrondissement de Paris. Un gars du ch’Nord cherchait l’anonymat pour échapper aux pesanteurs sociales, il a trouvé une petite famille autour de son bureau de presse ; un immigré algérien vivote grâce à de petits boulots ; un fils de classe populaire ; et un gardien d’immeuble, observateur. Tous dessinent un quartier en proie au changement, terreau d’une convivialité en train de disparaître…
Ménil’Décor, du nom d’une enseigne de bricolage du quartier, évoque une galerie d’ambiances et de portraits aussi singuliers qu’attachants. Via les récitatifs – parfois longs – et les dialogues humant l’air parisien, les auteurs Romain Multier et Gilles Tévessin nous plongent dans une atmosphère incarnée, qui échappe aux clichés sans s’en absoudre complètement. L’occasion de brosser une petite faune grouillante et bigarrée – des bobos, des classes populaires, des vieux gardiens du temple, des étudiants en galère – tissant un réseau de relations rendues parfois complexes par une scénographie décalée source de confusion. On y perçoit aussi l’approche bien documentée des mutations socio-spatiales d’un quartier, bercée par un peu de nostalgie face à la disparition d’une convivialité villageoise. Si le tableau intéresse, il reste toutefois dans le même registre, celui d’une sociologie bienveillante de quartier qui, au-delà de « sonner juste », s’adresse en priorité aux Parisiens. Le doux graphisme à l’ordinateur de Gilles Tévessin (Nord-Nord-Est) renforce lui le réalisme documentaire du récit qui est aussi, entre récits d’enfance et instantanés de vie, une mémoire de l’intime en forme de tendre psychogéographie.
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