Pourquoi adapter la Bible en bande dessinée ?
Adapter l’un des plus vieux textes de l’humanité (et best-seller mondial inégalé) est un véritable défi. Surtout s’il s’agit de la Bible, recueil fondateur pour la chrétienté. Face au double-risque d’une crispation laïque et des foudres vaticanes, le scénariste Michel Dufranne ne s’est pas laissé démonter. Avec son équipe, il a choisi la voie d’une adaptation fidèle et respectueuse de l’Ancien Testament, loin de la saga mystique qui, pourtant, aurait pu être tentante.
Comment avez-vous eu l’idée d’adapter la Bible en bande dessinée ?
D’abord, je me suis rendu compte d’une certaine méconnaissance, voire d’une ignorance, du texte de la Bible par des gens qui pensaient la connaître. Ensuite, il y avait face à moi cette laïcité à la française, qui est parfois assez radicale. Un collègue m’a même suggéré que la Bible c’était Mein Kampf en pire ! Je suis Belge, et là-bas, nous n’avons pas la même perception de la laïcité. Par exemple, je suis issu d’une famille laïque qui a jugé bon de m’inscrire dans l’enseignement privé catholique, car elle pensait que la culture religieuse faisait partie de la culture générale. À moi de choisir de croire ou pas après.
Le texte de la Bible n’est-il pas dépassé aujourd’hui ?
Heureusement ou malheureusement, c’est un ouvrage d’une terrible actualité. Je me suis amusé à observer le nombre de références – directes ou indirectes – à la Bible et à ses interprétations dans les journaux télévisés. Il y en a bien plus qu’on ne le pense ! Qu’on le veuille ou non, ce texte est le socle de nos sociétés judéo-chrétiennes. La volonté de départ de cette bande dessinée était de ramener les gens vers le texte, pour qu’ils le connaissent mieux et puissent se faire leur idée.
Vous avez déjà adapté en BD Les Trois mousquetaires d’Alexandre Dumas et Candide de Voltaire. Pour la Bible, est-ce un travail différent ?
Techniquement, l’acte d’adaptation est identique. Mais rapidement, on se pose la question des niveaux de lecture. Comme la Bible en contient plusieurs, il faut savoir jusqu’où les faire apparaître.
Comment faire des coupes ou des choix dans un tel texte ?
Avec mon co-scénariste Jean-Christophe Camus, nous ne souhaitions pas faire un résumé de la Bible. Il fallait raconter une histoire, bien faire comprendre qui était qui, qui faisait quoi… Nous avons eu de longues discussions, sur ce qu’il fallait garder ou pas, entre nous et avec notre équipe artistique croate (Damir Zitko et Vladimir Mario Davidenko). Ces derniers ont une vraie culture chrétienne, bien que légèrement différente de la nôtre. Finalement, nous n’avons retiré que les passages descriptifs qui n’auraient rien donné en images.
Vous avez choisi de rester très près du texte…
Nous ne voulions surtout pas nous laisser aller à l’interprétation. Le plus gros du texte est directement tiré de la traduction de Louis Segond (1901), qui nous est apparue comme la plus accessible, la plus œcuménique, et qui nous a été conseillée par plusieurs spécialistes. Et en plus, elle est libre de droit !
La Genèse met en scène plusieurs générations d’hommes et de femmes, qui changent de pays, accomplissent parfois des actes héroïques, communiquent avec leur Dieu… N’avez-vous pas été tenté d’en faire une grande saga romanesque ?
J’avais plusieurs garde-fous pour m’en empêcher. D’abord, le texte lui-même, auquel je voulais coller. Ensuite, mes dessinateurs croates qui, j’en suis certain, n’auraient pas compris si j’avais pris un virage fantasy. Et enfin, le souvenir d’un de mes professeurs d’histoire de l’Université libre de Bruxelles. Il livrait souvent un regard caustique sur les textes religieux, et nous avait donné une version profane et guignolesque de la Bible : Jésus n’était au final qu’une sorte de chef de bande, type Hell’s Angel, qui, à force de contester l’autorité, avait fini par être arrêté et exécuté. J’ai souhaité éviter de tomber dans cette interprétation.
Avez-vous eu des difficultés à définir la représentation graphique des événements et des personnages décrits dans la Bible ?
Damir Zitko et Vladimir Mario Davidenko se sont très bien débrouillés. Je leur ai simplement fait une remarque sur le physique des femmes, qui ne devaient certainement pas toutes ressembler à des Croates ! Et puis, il y a eu la question de la nudité de la séquence avec Adam et Ève. Nous avons dû refaire ces pages, car des éditeurs étrangers, intéressés par adapter la BD chez eux, craignaient de ne pouvoir le faire si Ève apparaissait trop nue !
Avez-vous eu l’avis du Vatican sur cet album ?
Nous n’avons pas cherché à recevoir son « imprimatur », car l’Ancien Testament est suffisamment œcuménique et universel pour s’en dispenser. Toutefois, Frédéric Lenoir, directeur du Monde des religions, nous a servi de relecteur éclairé. En revanche, pour le Nouveau Testament, qui est plus sensible car directement lié aux fondements du christianisme, nous consulterons sans doute des membres du clergé.
N’avez-vous pas l’impression de travailler pour l’Église ?
Non, je pense sincèrement que ce n’est pas être prosélyte que d’informer les gens sur le texte qui est à la base de leur société. C’est même quasiment un véritable travail de démocrate, pour tenter d’éviter les dérives intégristes. Mon but est de faire réagir les gens, car chacun va trouver dans la Bible quelque chose de différent, quelque chose qui le renvoie à lui-même. Je pense que nous avons réalisé une BD miroir.
Pourquoi ne pas faire de même avec le Coran ?
Adapter le Coran, c’est un vrai fantasme ! C’est un texte très beau, très poétique. Mais je ne pense pas que ça se fera. D’abord, parce que ce n’est pas ma culture. Et parce que c’est un sujet beaucoup trop sensible aujourd’hui.
Propos recueillis par Benjamin Roure
Images © Delcourt
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La Bible #1 – L’Ancien Testament – La Genèse (première partie)
Par Damir Zitko, Vladimir Mario Davidenko, Michel Dufranne et Jean-Christophe Camus.
Delcourt, 14,95 €, le 5 novembre 2008.
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Sur RCF-Bruxelles Jeudi passé, et dans le n° 43-44 de Gabriel la revue du CRIABD, je suis assez critique sur ce premier volume. Je veux bien être consulté sur le Nouveau Testament (beaucoup plus délicat). Je suis cependant heureux de la qualité du dessin de cet album et qu’il soit mis en vente dans les librairies BD et en grandes surfaces. Cependant je tiens à souligner, comme l’a fait mon ami Henri Filippini dans CASEMATE, que ce n’est pas la première Bible en BD (il y en a chez les protestants américains depuis 1942 !) et que le Coran en BD existe déjà.
Frère Roland Francart sj, Directeur-Fondateur du Centre Religieux d’Info et d’Analyse de la BD (CRIABD, Bruxelles) -
Sur RCF-Bruxelles Jeudi passé, et dans le n° 43-44 de Gabriel la revue du CRIABD, je suis assez critique sur ce premier volume. Je veux bien être consulté sur le Nouveau Testament (beaucoup plus délicat). Je suis cependant heureux de la qualité du dessin de cet album et qu’il soit mis en vente dans les librairies BD et en grandes surfaces. Cependant je tiens à souligner, comme l’a fait mon ami Henri Filippini dans CASEMATE, que ce n’est pas la première Bible en BD (il y en a chez les protestants américains depuis 1942 !) et que le Coran en BD existe déjà.
Frère Roland Francart sj, Directeur-Fondateur du Centre Religieux d’Info et d’Analyse de la BD (CRIABD, Bruxelles) -
deja s acheter ,j ai lu beaucoup peu manquer dans le bible mais c est dessiner la jolie images merci
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deja s acheter ,j ai lu beaucoup peu manquer dans le bible mais c est dessiner la jolie images merci
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Bon, d’accord Dargaud (pas fameux le dessin de Blasco, il était meilleur en western) était la seule BD en librairie BD. S’il faut citer la meilleure c’est celle de Larousse (1984), coordonnée par Etienne Dahler, avec des dessins d’Eleuteri Serpieri, Marcello, Frisano, Bielsa, Poïvet, de la Fuente (cf BDM 1991-1992, pages 551-224) et ne pas oublier toutes les Bibles protestantes. On peut comparer le traitement de la Genèse en images dans ces différentes bibles en BD. Celle de Delcourt me déçoit. C’est un goût personnel, mais on peut demander aussi aux exégètes ! La première étude a paru en 1979 aux éditions Lumen Vitae (Centre de Catéchèse) à Bruxelles, sous le titre « Bandes Dessinées Bibliques et catéchèses » d’André Knockaert et Chantal van der Plancke
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Bon, d’accord Dargaud (pas fameux le dessin de Blasco, il était meilleur en western) était la seule BD en librairie BD. S’il faut citer la meilleure c’est celle de Larousse (1984), coordonnée par Etienne Dahler, avec des dessins d’Eleuteri Serpieri, Marcello, Frisano, Bielsa, Poïvet, de la Fuente (cf BDM 1991-1992, pages 551-224) et ne pas oublier toutes les Bibles protestantes. On peut comparer le traitement de la Genèse en images dans ces différentes bibles en BD. Celle de Delcourt me déçoit. C’est un goût personnel, mais on peut demander aussi aux exégètes ! La première étude a paru en 1979 aux éditions Lumen Vitae (Centre de Catéchèse) à Bruxelles, sous le titre « Bandes Dessinées Bibliques et catéchèses » d’André Knockaert et Chantal van der Plancke
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Cette Bd est vraiment intéressante et bien écrit.
C’est un moyen ludique de faire connaitre aux gens la bible et ce qu’elle contient. J’ai vraiment été étonnée, j’ai lu la vraie bible et elle est parfois très ennuyeuse en particulier la genèse. Mais en BD c’est vraiment entrainant. Elle respecte les vrai écritures tout en ayant un coté ludique et instructif. C’est un jolie mariage de la culture et du divertissement.
J’ai hâte de voir la suite. Je conseille vraiment de la lire!! -
Cette Bd est vraiment intéressante et bien écrit.
C’est un moyen ludique de faire connaitre aux gens la bible et ce qu’elle contient. J’ai vraiment été étonnée, j’ai lu la vraie bible et elle est parfois très ennuyeuse en particulier la genèse. Mais en BD c’est vraiment entrainant. Elle respecte les vrai écritures tout en ayant un coté ludique et instructif. C’est un jolie mariage de la culture et du divertissement.
J’ai hâte de voir la suite. Je conseille vraiment de la lire!!
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