Magda n’est plus une petite fille, mais pas encore une jeune adulte. Ado renfermée, elle traîne sa solitude et son spleen dans une cité de bord de mer, industrielle et morne. Moquée au collège, en conflit avec sa mère, elle ne pense qu’à son ami Gaël et son frère Carmen, partis au lycée de la grande ville, les veinards. Pendant les vacances, les deux garçons reviennent. Et constatent que leur décor familier change. Magda est humiliée par son frangin qui se prend pour un dur, tente de comprendre son attirance pour Gaël, et se laisse embarquer dans des soirées fantasmagoriques et dans ses songes bizarres…

Passée par la section animation des Arts Décos de Paris, Bérénice Motais de Narbonne creuse l’univers construit dans son court-métrage Astrale, dont Magda était déjà l’héroïne. Sexualité pré-adolescente, harcèlement scolaire, solitude familiale, solastalgie (sentiment d’anxiété né de changements environnementaux), tentation de la fuite, rencontre avec l’alcool et les stupéfiants… Les grands thèmes de l’adolescence sont balayés dans cet épaisse bande dessinée plutôt taiseuse, au noir et blanc sans âge, empruntant lignes et figures au psychédélisme de la fin des années 1960 et en les mélangeant à une sobriété expressive plus proche de l’illustration jeunesse. Il ressort de ce mélange un rythme hypnotique entêtant et un ton volontiers étrange. Ce conte introspectif sans véritable intrigue agace par moments quand il se répète dans un nombrilisme obstiné et fermé. Mais il fascine quand il prend de la hauteur et brosse des séquences sensitives, tout en vertiges. Une expérience à vivre.