Un jour, Didier Tronchet a eu l’opportunité de s’installer quelques mois sur une toute petite île proche de Madagascar. Loin de tout, de la vie citadine, d’Internet et même de l’électricité. Avec son fils de 13 ans. L’occasion d’un retour sur soi-même et de vivre une relation privilégiée père-fils ? Pas tout à fait : plutôt l’occasion de ruminer sa position d’intellectuel occidental trop habitué au confort, et de voir son enfant devenir grand, de loin…

Pour partie publié dans la revue XXI comme un reportage à la première personne, et devenu un récit écrit aux éditions Elytis, Robinsons père et fils est une touchante bande dessinée, pleine d’humour distancié et de tendresse. Tronchet n’hésite pas mettre la dose en termes d’autodérision, se présentant comme un gentil raté, auteur sans le sou, expatrié timide, papa à côté de la plaque. De son trait épais et anguleux et ses couleurs lumineuses, il croque avec douceur la vie sans superflu de l’île aux Nattes, montrant le quotidien dépouillé des locaux comme le sourire satisfait des expat’. Mais surtout, il parle avec sincérité et sobriété de sa position de père, évoquant sa propre enfance dans le Nord, et de l’angoisse de laisser s’envoler son petit du nid sans avoir pu lui transmettre les valeurs qui lui sont chères. On rit, on est touché, car les mots sont justes et les dessins se mettent à leur service. Du très très bon Tronchet.