Sabre
Il y a bien longtemps, sur la Terre, le règne animal ne comptait pas d’hommes. Reptiles, mammifères, insectes en tous genres peuplaient la planète, selon la loi du plus fort et/ou du plus malin. C’est là que naît le héros de ce gros volume, un petit tigre aux dents de sabre.
Voilà un exercice de style aussi intrigant que déstabilisant. Pour sa première bande dessinée en album, Éric Feres choisit de bâtir un récit muet, dans un format à l’italienne, autour d’animaux préhistoriques. Un tour de force ! En effet, ses images détaillées, aux ambiances chromatiques étudiées, permettent une immersion agréable, voire hypnotique, dans ce monde hostile, plein de mammouths et d’oiseaux terrifiants. L’auteur a l’intelligence d’y emmener son lecteur par le regard et le cheminement d’un petit félin atypique, malingre et maladroit, qui survit par miracle au milieu de bêtes affamées. Un bébé tigre d’ailleurs traité différemment sur le plan graphique, avec une ligne douce et en aplat, alors que les autres « personnages » et les décors sont chargés de textures et de matière. Néanmoins, le but du livre demeure un peu obscur. Il y a certes une petite ambition documentaire, réussie, mais ce n’est clairement pas le propos central. D’ailleurs, les détours vers la surface d’une autre planète enjoigne à lire Sabre comme une métaphore de l’évolution, à travers le destin d’un mignon mammifère, symbole de pureté dans un monde sanguinaire et idéal personnage de bande dessinée… Pourquoi pas, mais cela ne suffit pas à maintenir l’intérêt sur ces 250 pages, dont certaines manquent aussi un peu de lisibilité. Un voyage dépaysant, mais vers une destination un peu trop floue et lointaine.
Publiez un commentaire