Saga, un webcomic super-héroïque
Il y a environ un an et demi naissait Saga, un webcomic made in France, qui prend sa source dans l’imaginaire anglo-saxon. Un feuilleton de super-héros, humain et pas bling-bling pour un sou, porté par un auteur inspiré et investi, Maxime Garbarini. Un scénariste-dessinateur qui connaît parfaitement ses classiques et cite en vrac Chris Claremont, Grant Morrison, Warren Ellis, Peter David, le duo Craig Kyle-Christopher Yost ou Joe Hill parmi ses principales influences. Aidé de quelques dévouées petites mains, l’enthousiaste Max développe pas à pas, chaque semaine, son ambitieuse histoire de jeunes héros découvrant leurs pouvoir et affrontant des nazis. Il raconte à BoDoï comment cette bande dessinée est née, annonce ses futurs développements et présente l’histoire inédite qu’il a accepté de diffuser ici.
D’où vient l’idée de Saga ?
Au printemps 2010, je préparais une seconde visite en Californie et notamment à San Diego, où se tient le Comic Con, une énorme convention sur les comics. C’était pour moi l’occasion rêvée de me lancer, et de montrer mon travail à un grand nombre d’auteurs et d’éditeurs pour recueillir leurs avis et conseils. J’avais déjà illustré un album chez Hachette (Premier bébé) qui était plus de l’ordre de la tranche de vie, dans la veine de la série tv Un gars, une fille, et je brûlais d’envie de revenir à mes premiers amours : les comics. J’ai donc ressorti un travail que j’avais amorcé 10 ans auparavant, avec mon ami Olivier Robert. Tous deux, nous avions posé les bases d’un univers « partagé » où évoluaient tout un tas de super-héros, hommages assumés aux archétypes de Marvel et DC dons nous étions des fans finis. Après avoir préparé le projet dans les grandes lignes, et alors que j’avais commencé à dessiner les pages, nous avons finalement laissé tomber, car trop occupés par notre entrée dans la vie active. Nous avions situé nos histoires à une époque qui nous est chère : les années 70, car c’est grâce aux comics de cette époque que nous avions chacun développé notre passion.
Vous mélangez background historique et géographie fictive…
Lorsque j’ai souhaité reprendre le projet, je me suis posé la question des origines de cet univers, de ce qui avait pu se passer dans les années 60, puis 50, etc. Jusqu’à en arriver au moment clef, déclencheur de l’histoire, un étrange accident survenu quelques années avant la Seconde Guerre mondiale… Sans en faire un récit historique bardé de références, j’essaie de m’inspirer de l’esprit d’une époque pour décrire l’ambiance dans laquelle évoluent les personnages. Et dès le départ, avec Olivier, nous avions envie de créer une quelques lieux fictifs pour nous permettre un peu de fantaisie. La saison 2 sera beaucoup plus centrée sur notre ville de Greeton et j’ai hâte de m’y mettre car, même si ça reste un exercice parfois laborieux pour moi, j’adore dessiner les scènes et paysages urbains. Le plan de la ville existe déjà avec ses quartiers, son histoire, ses monuments… Ce sera vraisemblablement un mélange de Boston, New York et Chicago. Sans aller aussi loin que Gotham, Metropolis ou que Kurt Busiek sur Astro City, j’espère pouvoir donner à Greeton suffisamment de sensations et de matières pour que les lecteurs se l’approprient.
Pourquoi ce titre, Saga ?
Je suis assez fan de l’auteur Brian Wood qui a le flair pour trouver des noms de séries simples et accrocheurs: Demo, Local, DMZ. Ça me paraissait plus pertinent d’aller dans ce sens plutôt que de donner un titre plus « super-héroïque ». Et au final, l’histoire de Saga tourne beaucoup autour du concept de la famille (la famille qu’on perd, qu’on gagne, qu’on recherche) et le mot « saga » signifie littéralement un récit qui conte la vie d’un personnage de sa naissance à sa mort, et parfois explorant aussi celle de ses ascendants et descendants. Le but étant de détailler cet univers à travers plusieurs décennies, je me suis dit que le terme Saga correspondait parfaitement.
Parlons un peu de l’histoire.
Elle débute donc à la fin des années 30, avec la découverte par la fondation Diamond d’une nouvelle forme d’énergie. James Norton, un des scientifiques britannique de la fondation, est vite rejoint par Nathanael Norton, son brillant neveu américain. Ensemble, ils tentent de mettre au point un moyen de canaliser cette énergie. Mais rapidement, ils découvrent que celle-ci a des effets secondaires sur le métabolisme humain et notamment sur Ben et Betty les enfants de James, provoquant l’apparition de pouvoirs surnaturels. James, poussé par une curiosité scientifique sans limite, quitte l’Angleterre pour étudier d’autres cas sur le continent. Bien sûr, comme nous sommes en pleine Seconde Guerre mondiale, rien ne va se passer comme prévu… Le récit s’articule donc autour de la famille Norton, mais on y retrouve aussi 5 autres personnages clefs : Aaron, un jeune orphelin irlandais au passé tourmenté; Ronald Sandler, un G.I américain en mission en Bretagne; Clémence/Ruby, une apprentie cambrioleuse livrée à elle-même; Jacob, un enfant juif prêt à tout pour survivre dans l’Allemagne nazie; et surtout Anton, un père de famille polonais à la recherche de sa famille.
Quel sont vos méthode et rythme de travail ?
Comme j’ai un « travail de jour » (je suis webdesigner chez Bronx Agence, Paris), je me suis donné un rythme de parution relativement raisonnable d’une page maximum par semaine. Ce format a aussi beaucoup influencé ma façon d’écrire car il me fallait accrocher le lecteur à chaque page, condenser le récit et à la fois constamment relancer l’intrigue. Au final, c’est un super exercice car, pour chaque page, j’essaie de répondre à une question, et d’en poser plein d’autres, en espérant que le lecteur petit à petit se prenne au jeu. En général, je storyboarde les pages par groupes de 10/12. Il me faut entre 1 et 2 jours pour dessiner et encrer une page. Je passe ensuite le relais à l’excellent Julien Nido pour les couleurs. Enfin, je m’occupe du lettrage et de la traduction anglaise, qui est relue et adaptée par Ronald Moore.
L’équipe ne se cantonne pas à vous trois…
Au quotidien, j’ai aussi l’aide de Gabriel Venet pour tout ce qui est communication et relation presse, Sandra Girollet, graphiste et maquettiste qui a réalisé beaucoup de pages « bonus documents » du début de saison, et de Léo De Spiegeleer qui s’occupe du développement technique du site. Celui-ci s’est aussi étoffé avec d’autres contenus annexes comme des fiches de personnage, des bonus, sketches, fan art etc. Et surtout des nouvelles qui donnent un autre éclairage sur certains personnages et enrichissent, je pense, le récit. J’ai écrit les deux première, puis j’ai passé le relais à Nalla, un écrivain rencontré sur la Comic Con Paris.
Pourquoi avoir choisi le format webcomics ?
L’envie de raconter toute cette histoire, sans doute un peu trop ambitieuse, m’a vraiment poussé à concrétiser le projet. Je suis donc parti en Californie avec une petite démo d’une quinzaine de pages, et je suis revenu plus motivé que jamais. Dans le même temps, j’avais découvert le travail de Cameron Stewart et de Karl Kerlsh, qui, en parallèle de leur carrière chez les deux grands (Marvel et DC) menaient des projets perso à suivre sur le web (Sin Titulo, et The Abominable Charles Christopher). Leur initiative m’a paru géniale, simple, directe. Donc plutôt que de proposer mon projet à des éditeurs, je me suis lancé dans le webcomics. Ce format me permet de publier et diffuser quand je peux/veux, à moindre coût et d’être en contact direct avec les lecteurs et lectrices si besoin, sans intermédiaire.
Comment va se développer votre univers ? Souhaitez-vous le transposer en version papier ?
La première saison s’achèvera au lendemain de la guerre. Chaque saison couvrira plus ou moins une décennie et mettra en scène des personnages différents, avec quelques héros « fils rouge » qui feront le relais. Si tout va bien, et je sais que c’est très ambitieux, j’aimerais pouvoir faire 5 saisons. Il reste environ une quarantaine de pages à paraître sur le site pour clore la saison 1. Une fois achevée, l’idée est bien sûr d’en proposer une version papier qui sera agrémentée de pages supplémentaires, sorte de « version longue, director’s cut » qui me permettra de creuser davantage certains recoins de l’intrigue, et d’affiner les personnages. Au total je vise un album de 120 pages, format comics 17×26. Pour l’instant, je n’ai démarché officiellement aucun éditeur, mais je commence à recueillir l’avis de quelques professionnels pour continuer à améliorer le projet.
Et une version numérique payante ?
Je reste perplexe vis-à-vis de ce sujet, et je n’ai pas de solution précise en tête, ni de modèle économique. Mais c’est vrai que c’est un projet sur lequel j’investis tout mon temps, et de l’argent. Donc à terme, je ne serais pas contre pouvoir le vendre d’une façon ou d’une autre, ne serait-ce que pour rembourser le matériel, ou payer les déplacements et réservations dans les festivals.
Qu’est-ce que Close Call Comics ?
Il s’agit d’un micro label indépendant qui ne publiera que des aventures et récits se situant dans le « SAGAverse ». L’idée est d’étendre petit à petit cet univers, notamment en invitant d’autres artistes à venir dessiner certains chapitres de la saison 2, et pourquoi pas, développer d’autres séries en parallèle. Je tiens à garder la main sur la trame générale, mais j’ai tellement de personnages que je ne suis pas contre en confier certains à quelques artistes ou auteurs courageux(ses) qui voudraient jouer avec. C’est déjà ce le cas sur le site au travers des fan-art, et surtout des nouvelles auxquelles participe notamment Nalla.
Et après Saga ?
A l’avenir, disons quand Saga sera achevée, si je suis toujours vivant et si vous êtes toujours là pour lire tout ça, j’aimerais vraiment lancer ma seconde série, Partisans, qui se situera de nos jours. Elle met en scène des personnages que j’ai en développement depuis des années et qui sont d’une certaine façon à l’origine du projet Saga.
Pouvez-vous nous présenter l’histoire courte inédite que diffusons ci-dessous ?
Ces 5 pages sont un mini-chapitre intitulé La Lettre. À travers les confidences de Ronald, un des personnages, elles offrent un avant-goût de ce qui se passera au cours de la saison 1. On y retrouve les protagonistes, en équipe et en costumes de combat, aguerris et déterminés à aller jusqu’au bout de leur mission. Quelle est leur mission, vous le découvrirez bientôt en lisant les épisodes du site !
Propops recueillis (par email) par Benjamin Roure
Voici donc, en exclusivité pour BoDoï, le mini-chapitre « La Lettre », issu de l’univers de Saga. Univers que vous pouvez retrouver sur le site Close Call Comics, ou sur leur page Facebook.
CLOSE CALL COMICS, SAGA and all its characters are property and copyright of MAXIME GARBARINI
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