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Sélection Comics – FreakAngels

9 mai 2011 |

La Sélection Comics vous propose un focus sur un titre anglo-saxon qui vous sortira de la routine super-héroïque. À l’occasion de la sortie en VF du 4e tome de FreakAngels, penchons-nous sur ce feuilleton british et post-apocalyptique.

freakangels_quatreRemettre en question, série après série, le statut du superhéros et ses tentations fascisantes, Warren Ellis prouve depuis The Authority qu’il sait faire. Ces dernières années, via Black Summer, No Hero et autres Supergod, il a même donné l’impression d’avoir largement fait le tour du sujet. Rebelote pourtant avec FreakAngels, dont le quatrième volume vient de sortir en France au Lombard, qui aborde à nouveau la question de la responsabilité chez des individus dotés de pouvoirs. Ici, douze Anglais nés au même moment il y a 23 ans et mystérieusement liés. Refrain connu.

Sauf que cette fois, Warren Ellis délaisse la démesure (et les carrures stéroïdées) des titres évoqués plus haut au profit d’une approche dépouillée. Raccord avec le dénuement dans lequel vivent ses héros et avec la technologie de bric et de broc qui prévaut dans cette série à l’ambiance steampunk. Car il y a six ans, une catastrophe a changé la face du monde et submergé Londres. Retranchés dans les rues inondées du quartier de Whitechapel, KK, la mécano, Luke, le jardinier, Miki, la médecin, et leurs 8 camarades se sont organisés pour survivre et reconstruire un semblant de société. 8 ? + 3 ? On avait pas dit 12 Anglais étranges ? Si, mais le dernier des FreakAngels, Mark, est persona non grata à Whitechapel. Les dérives fascisantes, c’est lui.

Heureusement, son retour inévitable et l’affrontement qui en découlera forcément, ne constituent que l’arrière-plan du récit. Ce qui intéresse vraiment Ellis, c’est le quotidien des personnages, que ce soit les bidouillages de Caz, l’ingénieur du groupe, ou les patrouilles de Jack, le marin. Les FreakAngels, envisagés au départ par l’auteur comme une version vingtenaire des gamins flippants du Village des Damnés, se révèlent au final moins freaks justement que représentatifs de la jeunesse britannique d’aujourd’hui. freakangels_kkMark et une paire d’autres mis à part, ces rescapés livrés à eux-mêmes sont des filles et des gars relativement normaux. À coups de répliques «live from the pub», ils passent l’essentiel de leur temps à se chambrer comme tous les gens de leur âge. OK, parfois sans avoir besoin de se parler, télépathie oblige. freakangles_manutdMais apocalypse ou pas, on continue dans leur Angleterre dévastée à porter des maillots de Manchester United et à citer Doctor Who. Un peu comme dans la série TV Misfits.

Le parallèle avec la télé n’est pas anodin puisque, dans sa narration comme dans son mode de diffusion premier, FreakAngels applique une logique de feuilleton. Publié d’abord sur internet à un rythme hebdomadaire, ce webcomics donne l’impression de s’écrire au fil de la plume, en direct, sans trop savoir où il va. Le tempo général est un peu déstabilisant. En trois recueils de 146 pages [nous n’avons pas encore lu le 4e tome, sorti le 6 mai], il ne s’est pas passé foultitude de choses. Sentiment accentué par le découpage quasi-systématique des planches en quatre cases égales qui instaure une certaine uniformité. On ne saurait le reprocher à Paul Duffield, sommé de livrer 6 pages par semaine, et qui s’évite ainsi de s’épuiser en mises en pages inventives. L’ensemble est, d’autre part, plus adapté à une lecture online. Dommage par contre que le dessinateur se montre mal à l’aise dans les (rares) séquences d’action, statiques et peu lisibles.

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Mais tous ces partis-pris et faiblesses n’entravent jamais le plaisir éprouvé à suivre l’odyssée de ces attachants X-Men de proximité livrés à eux-mêmes, servie par le trait élégant d’un Duffield sorti de nulle part (Ellis l’a recruté sur la foi de travaux postés sur le net) et dotée d’un joli casting. Un work in progress séduisant, dont on attend de voir s’il sera à la mesure du potentiel des FreakAngels, qu’on devine, lui, colossal.

Guillaume Regourd

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FreakAngels.
Par Paul Duffield et Warren Ellis.
Le Lombard, 16 €, T4 le 6 mai 2011.

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