Les oies bernarches, geais, moucherolles, rouges-gorges, mésanges… le fascinent. Haïtien grandi en France, puis émigré en 1803 aux Etats-Unis, Jean-Jacques (devenu John James) Audubon ne vit que pour capturer, sur le papier, la vitalité et la précision morphologique des oiseaux. L’homme délaisse sa femme et ses enfants pour poursuivre son rêve : recenser, par le dessin, l’intégralité de l’avifaune américaine. Seulement voilà, les sociétés scientifiques ne sont pas intéressées par ses oeuvres, trop artistiques…

Riche idée que celle du scénariste Fabien Grolleau — le cofondateur des éditions Vide Cocagne —, qui exhume l’incroyable destin d’un naturaliste oublié. La carrière contrariée d’Audubon est captivante : de son sujet, l’incroyable diversité des volatiles, à la manière dont il agit (le naturaliste tue ses objets d’études avant d’en saisir la vie), ou encore la réaction de la société face à ses travaux, tout intéresse. Au dessin, Jérémie Royer (Yesterday) utilise un style simple et clair, charbonneux quand il le faut, notamment pour restituer la densité de la forêt ou d’un vol groupé. Tout à fait honorablement, il se confronte au trait réaliste, trempé dans une pointe de magie, du véritable Audubon (dont quelques oeuvres sont reproduites en fin d’album). Une lecture agréable et instructive, qui permet la (re)découverte d’un personnage très romanesque.