Suzette ou le grand amour
Suzette vient de perdre son mari, après des décennies de mariage sans histoire. Mais comme elle le confie, incidemment, à sa petite-fille Noémie, elle « n’arrive même pas à être triste ». Voilà qui interpelle la jeune femme, qui vient justement de s’installer dans un studio avec son copain, jovial étudiant qui semble davantage profiter de ses amis plutôt que se projeter dans la vie de couple. En interrogeant sa grand-mère, Noémie découvre qu’elle n’a connu qu’un seul homme dans sa vie et que ce dernier n’a pas été très fidèle. Et surtout, qu’elle n’a jamais vraiment été amoureuse. Sauf d’un séduisant Italien croisé un été où elle faisait la jeune fille au pair… Noémie embarque alors Suzette par-delà les Alpes pour tenter de retrouver le beau Francesco…
Un road-trip entre une petite fille et sa grand-mère, un amour de jeunesse à retrouver, une vie de couple à reconsidérer… Les bases du scénario de Fabien Toulmé comportent tout ce qu’il faut à une jolie comédie feel good, très « cinéma français » dans l’esprit – parler des relations entre hommes et femmes et profiter d’un écart d’âge (et donc d’habitudes et de vision du monde) pour faire rire. Dans cette idée-là, l’auteur fait tout comme il faut. Mais ce qui semble lui plaire par-dessus tout, c’est s’attarder sur les détails réalistes et crédibles du quotidien. Mais, problème, tous ces micro-événements ralentissent terriblement l’action et ne disent finalement pas grand-chose des personnages et de leurs motivations. On sonne à la porte, on s’assoit pour boire le café, on se lève pour faire la vaisselle, on enfile un maillot de bain (plusieurs fois), on va même choisir une étagère à Ikea… À force d’éviter les ellipses, l’auteur des Deux vies de Baudouin ennuie terriblement, d’autant que ses dialogues sont très plats – à l’instar de sa mise en scène, en fait…
Aucune surprise ne viendra doper le récit, qui compte plus de 300 pages et aurait certainement tenu en moins de 100 avec une vraie densité narrative et des dessins qui portent du sens. Car graphiquement aussi, il ne se passe pas grand-chose, autour de ces deux femmes qui papotent, à la cuisine, en voiture, sur un balcon… C’était déjà le gros défaut de L’Odyssée d’Hakim, qui noyait le témoignage puissant d’un réfugié dans une narration délayée sans raison. Mais là, en plus, il n’y a pas de fond solide pour compenser. Suzette ou le grand amour ? Le grand sommeil, plutôt, mais le titre était déjà pris.
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