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Un an après le tsunami : « Le manga et l’animation ont été un refuge pour le peuple japonais »

27 avril 2012 |

japon_introPour marquer le jour anniversaire du séisme sur la côte Pacifique du Tôhoku, puis du tsunami et de l’accident nucléaire de Fukushima qui ont suivi, Kazé Manga a initié un ouvrage collectif en soutien à la population japonaise : Japon – 1 an après. Raphaël Pennes, directeur éditorial du label qui appartient au géant nippon Shôgakukan-Shûeisha-Shopro depuis 2009, revient pour BoDoï sur ce projet original et louable.

japon_tsunamiUn an après le drame qui a touché le Japon, quelle est la situation dans le pays ?
Je pense que pas mal de choses ont été entreprises notamment pour nettoyer les débris, reloger les habitants, etc. Mais tout reste à reconstruire car les vies et les villes détruites sont autant de missions pour les institutions et les organisations caritatives à gérer au quotidien. Sans parler du nucléaire…

Qu’est-ce que les Japonais ont retenu de cet événement ?
C’est la question fatidique à laquelle il est difficile pour moi, Français, de répondre. La retenue – pour ne pas dire la pudeur – nippone est une véritable barrière pour les étrangers et il est très difficile de savoir comment le peuple a vécu et vit encore cette tragédie. J’aimerais vraiment avoir un jour ne serait-ce qu’un semblant de compréhension de ce que peuvent ressentir les Japonais…

Vos relations avec les éditeurs et auteurs japonais ont-elles changé ?
Finalement, pas trop. Nous avons accusé un léger retard pendant moins d’un mois, et ensuite tout est redevenu tout à fait normal au quotidien.

Les mangakas ont vite exprimé leur soutien envers la population, mais il semble y avoir eu différentes réactions. Certains se sont donnés à fond pour soutenir leurs compatriotes alors que d’autres ont mis en doute le bien-fondé de leur métier…
Le monde entier s’est exprimé sous de multiples formes, notre ouvrage en est un exemple mais, au Japon, très peu d’initiatives ont été prises dans le milieu de l’animation et du manga. On a vu des auteurs faire des dessins sur leur blog ou leur site web, voire quelques initiatives plus poussées, notamment Smile de Takehiko Inoue. Mais rien de vraiment massif finalement, qui soit allé plus loin qu’un soutien moral pendant quelques jours ou semaines après les faits. Encore une fois, la pudeur et la retenue ont été de rigueur dans le secteur de l’édition et des produits culturels. Ce sont finalement des initiatives en marge du marché qui furent les plus visibles au Japon.

japon_revoir

japon_couv3dAu niveau du marché du manga, y a-t-il eu des changements notables de consommation ou de création depuis un an ?
Au Japon, pas vraiment, et encore moins en France. Je pense que le manga et l’animation ont été un refuge pour le peuple japonais, et que cela a permis au marché de se maintenir. Pendant cette période, One Piece a même littéralement fait exploser les ventes.

Le développement du numérique en France semble avoir pris plus d’ampleur.
Je ne pense pas que cela ait à voir avec la catastrophe. C’est juste que l’offre numérique commence à se mettre en place, le taux d’équipement augmente et donc le moment est venu de s’atteler à créer ce marché, petit à petit.

Qu’est-ce qui vous a amené à créer l’ouvrage collectif Japon – 1 an après ?
Nous avons tous chez Kazé – et plus généralement dans le milieu de l’animation japonaise et du manga – été touchés par les événements. Étant marié à une Japonaise, originaire du département de Fukushima, j’ai eu envie très rapidement de produire un livre qui, grâce à nos fans, permettrait d‘apporter aux institutions des fonds pour aider les victimes. Nous avons un public qui est très fidèle, d’une part, et fan du Japon d’autre part. Il était assez évident qu’une telle initiative avait du sens, surtout pour nous qui appartenons à un groupe éditorial japonais.

japon_iciComment avez-vous choisi les auteurs pour ce projet ?
Nous avons fait appel à David Guélou et Tomoko Kumada, qui étaient en charge des contenus de la revue Akiba manga chez Ankama presse. Pendant plus d’un an, j’ai travaillé entre Paris et Tokyo avec des auteurs nippons, amateurs ou professionnels: ils souhaitaient eux aussi proposer une initiative de ce type pour aider leur pays. Ce sont donc eux qui nous proposé divers auteurs, et nous avons retenu les meilleurs – selon nous – qui ont travaillé dur, et dans des délais très courts, pour réussir à proposer le livre tout juste un an après les événements. Car, malheureusement, cet impératif était primordial pour s’assurer l’intérêt de la presse et des consommateurs.

Quelles ont été  les lignes directrices données aux auteurs ?
Tout simplement d’écrire et de dessiner leur vision personnelle des événements à destination d’un public occidental, français en premier lieu. Ils étaient libres au niveau artistique et ont pour certains souhaité s’adjoindre l’aide d’un scénariste, car le sujet était difficile à traiter pour eux ou la responsabilité trop lourde. Nous avons juste tenté d’avoir différents points de vue et types d’histoires, pour éviter une redondance des contenus.

Le livre est-il proche de ce que vous attendiez ?
Oui, au vu des délais que nous avions pour le réaliser. Maintenant, il est certain qu’il est imparfait tant dans sa forme que dans son contenu, et que le temps a manqué pour faire beaucoup mieux. japon_bureauMais c’est un livre honnête, qui a le mérite d’offrir le point de vue sincère d’auteurs nippons qui se sont donnés à 200%, avec l’aide d’auteurs français qui ont tout fait pour ne pas trahir leurs intentions. La plus grande réussite de ce livre est, pour moi, la formidable aventure éditoriale franco-japonaise qui nous a unis autour du désir de venir en aide aux victimes du tsunami.

Qu’avez-vous appris de cette expérience, par rapport à votre travail habituel (achats et gestions de licences) ?
Nous avons pu découvrir ce qu’implique d’être un éditeur à proprement parler. La gestion de la création des scénarios, des planches de dessins, de la cohérence globale de l’ouvrage. Mais aussi la gestion d’auteurs, le suivi de la relation et des plannings… C’est clairement un autre travail que d’éditer des mangas !

Comment le livre a-t-il été perçu par les éditeurs japonais et plus largement à l’étranger ?
Pour être franc, nos maisons mères sont très fières de notre initiative et, je pense, heureuses – humainement – d’avoir une filiale qui s’implique dans le soutien du Japon. Malheureusement, pour l’instant, nous étudions encore comment publier ce livre à l’étranger, la principale problématique étant la période de publication qui a peu de sens, si déconnectée de l’actualité. Aussi, la plus probable piste serait une publication en mars 2013 pour les deux ans des événements, mais c’est moins puissant qu’un an après. Du coup, pour l’instant, rien n’est acté.

Avez-vous d’autres projets de créations originales avec des Japonais ou des Français ?
Cela nous a donné envie de prolonger cette expérience éditoriale, et nous allons développer d’autres projets franco-japonais dans les mois à venir pour diversifier nos activités d’éditeur. Mais il est encore un peu tôt pour en parler.

Propos recueillis (par mail) par Rémi I.

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Japon – 1 an après (8 regards sur le drame)
Collectif.
Kazé, 19,95 €, mars 2012.

Images © Kazé SAS, All rights reserved.

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Commentaires

  1. Une belle initiative et un livre très sympa.

  2. Une belle initiative et un livre très sympa.

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