Ville avoisinant la Terre
Farid rentre chez lui, après une journée de travail. En bus, il traverse Beyrouth. Mais arrivé dans son quartier, quelque chose a changé. Son immeuble a disparu et sa famille avec ! L’obscurité arrive, en même temps que d’étranges personnages, transsexuel, révolutionnaire, édile local déguisé en Batman, sans compter cette foule hirsute chassant des chiens. Le monde de Farid a basculé, même ses amis, il ne les reconnaît plus. Il ne lui reste que ses pulsions, et un petit instinct de survie, pour espérer sortir vivant de ce rêve absurde et morbide.
Errance poétique et cauchemardesque, Ville avoisinant la Terre prend la forme d’une allégorie de la vie dans un pays en guerre, empruntant ses ressorts dramaturgiques à la littérature de Kafka. En voyant la ville et les gens qu’il connaît se dérober devant ses yeux pour laisser apparaître une vérité crue et absurde, Farid ne sait s’il devient fou ou s’il devient hyper conscient. L’idée est bonne, et prend tout son sens quand elle émane d’un artiste né pendant la guerre civile au Liban. Mais à trop vouloir rester dans le registre du rêve poisseux et troublant duquel on ne peut échapper, à trop multiplier les dialogues allusifs, les personnages déments et les rebondissements forcément improbables, il finit par lasser. Dommage, car le dessin, lui, est d’une beauté saisissante. Une sorte de caricature sépia, dans un lavis au rendu hyper réaliste, évoquant les grandes heures de l’illustration américaine. Tout simplement superbe. Mais pas suffisant pour ramener le lecteur dans l’histoire, et l’émouvoir.
Publiez un commentaire